En dépit des critiques portant sur le traitement et la place des espèces animales par les humains, la considération d’aspects moraux lors du choix de ses activités hivernales ne semble pas être un enjeu majeur. Le traîneau à chiens, activité connue autant des touristes que des Québécois, est donc passé relativement sous le radar des débats sur la question. Des guides comme Emmanuel Paingaud, de la Pourvoirie du Lac-Beauport, veulent tout de même rassurer les amateurs sur les conditions de vie et de travail des chiens de traîneaux.

Même s’il comprend les inquiétudes derrière les critiques envers les chiens de traîneaux, Emmanuel Paingaud, vétéran du traîneau à chiens, ne s’inquiète pas. Pas plus que ses clients d’ailleurs, puisqu’à part quelques cas isolés de commentaires inquiets sur les réseaux sociaux, on ne lui a jamais reproché son travail avec les chiens.

Et des chiens, il en a. Ils sont près d’une centaine d’animaux installés dans le chenil de la pourvoirie. Malgré cela, le musher ne se laisse pas impressionner par la quantité de travail que cela demande.

Beaucoup de nourriture et des sorties régulières pour les garder actifs sont prévues quotidiennement. « La nourriture est importante. Ici, ils ont de la viande de bœuf tous les jours, plus des croquettes en appoint », explique le guide. « En plus d’une soupe quand c’est l’hiver avec tout ce qu’il faut dedans : tel que du poulet ou du poisson, des pâtes, des carottes pour qu’ils n’aient pas de problème de flux, par exemple », ajout-t-il.

L’alimentation doit répondre aux besoins en énergie plus élevés des chiens d’attelage, habitués aux froids hivernaux et à des efforts physiques plus intenses que les chiens domestiques selon lui.

Malgré tout, il peut arriver qu’un chien ne veuille pas partir en randonnée. Emmanuel Paingaud soutient que la situation est rare, mais rappelle qu’elle est possible. « On nous demande parfois si les chiens, on les force. Pas du tout! » assure le chef-guide. « Au contraire. On a des chiens qui arrivent à la retraite, et ils sont plutôt vexés quand on ne les emmène plus parce qu’ils ont tous envie d’y aller quand même », continue celui-ci. « Mais si on sent que le chien est vieillissant, on ne peut pas lui demander d’en faire plus qu’il en a déjà fait dans sa vie. »

Selon Emmanuel Paingaud, les chiens de traîneaux prennent plaisir à faire partie d’un attelage. C’est à la première randonnée que tout se décide : si le chien prend plaisir à sa première sortie, il en sera de même pour le reste de sa carrière.

Et lorsqu’un animal arrive à la retraite, il s’assure que le chien trouve une famille d’accueil bienfaisante. Quand ce n’est pas le cas, le guide explique qu’il s’occupe des bêtes durant leurs vieux jours.

Devant les quelques critiques qu’il a déjà reçu sur Facebook, la dernière remontant au mois de juin 2019, il reste néanmoins serein. « Il y en a qui peuvent penser qu’on exploite les chiens, mais pas du tout », reste-t-il convaincu. « Parce que comme je l’ai dit, les chiens prennent vraiment du plaisir, sinon, il n’y aurait jamais de cohésions dans nos équipes [de chiens]. »

 

Des novices surpris… en bien

Parti tenter l’expérience pour la première fois entre Montréal et Québec, à Sainte-Thècle, dans un ranch canin, Alexandre Côté a été ravi de voir la manière dont les chiens de traîneaux y étaient traités.

Son initiation au traîneau à chiens a eu raison des doutes qu’il entretenait sur la moralité de l’activité. « Faisant partie de monsieur madame tout le monde, je trouve que l’approche de Manitou se faisait dans le respect et les besoins du chien », affirme-t-il. « On ne sent absolument pas l’aspect commercial de la chose ».

Toutefois, si sa course l’a convaincu, il ne veut pas s’avancer à dire que tous les propriétaires de chiens de traîneaux sont aussi respectueux des animaux. « Ce n’est pas tous les endroits qui sont comme eux », conclut-il.

Pas végé comme activité

Pour Samira Slimani, co-coordonatrice générale de l’Association végane de l’Université Laval (AVÉGÉ), le traîneau à chiens n’est pourtant plus une activité qui s’inscrit avec les valeurs d’aujourd’hui. « En tant qu’association végane, notre but est d’abolir l’exploitation des animaux, et d’un côté, c’est quand même de l’exploitation animale parce qu’on les utilisent à nos propres fins », soutient-elle.

Même si la coordonnatrice admet que certains chiens en chenils peuvent être heureux, elle tente de sensibiliser les gens à expérimenter d’autres types d’activités hivernales. « Il y a tellement d’autres options qui s’offrent à nous », commente la végane de longue date. « Beaucoup de gens malheureusement ne connaissent pas ces options, alors on va essayer de rediriger ces gens-là vers d’autres activités pour leur permettre de faire des choix plus éthiques ».

Elle précise d’ailleurs qu’elle préfère une approche informationnelle plutôt que militante, pour tenter de briser avec l’image plus stricte associée à certains mouvements véganes.

En attendant, elle n’en veut pas aux gens qui tenteront l’expérience cette hiver. Pour elle, chacun doit tracer ses propres limites, après s’être renseigné sur l’activité. Elle pense quand même que les gens seront capables d’émettre leur propre jugement, qu’ils feront eux-mêmes leur prise de conscience et qu’avec un peu de chance, ils viendront bientôt à ne plus encourager ces activités d’hiver.