L’année 2021 a commencé de manière brutale pour les citoyens de Montmagny alors que ceux-ci ont appris le décès de leur maire, M. Rémy Langevin, le 1 janvier. Ceci a amené beaucoup de questions parmi les citoyens, car peu d’acteurs dans le milieu municipal semblaient connaitre la procédure lorsqu’un maire décède en cours de mandat. M. Guy Larochelle, ancien directeur du scrutin pour Élection Québec, explique ce qui se passe dans une situation exceptionnelle comme celle-ci.
M. Bernard Boulet avait pris la relève comme maire de Montmagny en novembre 2020, car M. Rémy Langevin l’avait nommé maire suppléant depuis son élection en 2017. Il a donc pris la relève lorsque le maire en place a annoncé son retrait de la vie politique afin de suivre des traitements pour un cancer du poumon. Toutefois, au moment de l’annonce du décès de M. Langevin, personne ne semblait savoir si M. Boulet allait automatiquement assumer le rôle de maire jusqu’à l’élection de novembre 2021. Selon l’ancien directeur du scrutin M. Guy Larochelle, ce n’est pas nécessairement le cas.
Maintenant à la retraite, M. Larochelle a été directeur du scrutin du Québec pendant 26 ans, dirigeant la tenue des deux référendums sur la séparation du Québec et du Canada, présidé trois élections scolaires et dirigé un référendum municipal à Charny. Spécialiste de la loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, il explique ce qui doit se passer dans une situation où un maire décède en cours de mandat.
« Si la vacance du poste se fait un an avant la période électorale prévue dans la loi, la greffière doit déclencher une élection générale au poste de maire. Ce n’est pas le cas pour nous à Montmagny, puisqu’il reste moins d’un an avant l’élection générale de l’automne prochain. Donc ce qui s’applique c’est l’article 336 qui stipule que les conseillers doivent élire parmi eux un nouveau maire qu’y aura tous les devoirs et pouvoirs d’un vrai maire. » – Guy Larochelle
Bernard Boulet fut lui-même surpris de cela, car il croyait qu’il serait maire jusqu’au élection.
« Je ne savais pas que l’on devait tenir une élection entre [les conseillers], la greffière non plus d’ailleurs, c’est le directeur du scrutin qui l’a appelé. » – Bernard Boulet
M. Larochelle ajoute qu’une règle dans la loi précise que, en cas d’égalité des votes, la personne qui préside la rencontre, dans ce cas le maire suppléant, obtient un vote supplémentaire en tant que président de l’assemblée.
Me Félix Michaud, directeur général de Montmagny, maintient qu’une élection partielle qui demande le vote des citoyens afin d’élire un maire aurait générée d’énormes dépenses pour d’élire quelqu’un qui n’occuperait peut-être pas le poste plus de huit mois, puisqu’une élection générale doit avoir lieu en novembre 2021 :
« Une élection partielle au poste de maire génère les mêmes coûts qu’une élection générale, car cela oblige à faire sortir le vote de l’ensemble des districts de Montmagny ce qui est environ 115 000$. » – Félix Michaud
Un mandat intérimaire disputé
Lors de la mise en candidature, le maire suppléant, Bernard Boulet a immédiatement remis la sienne à la greffière de la Ville de Montmagny, Me Karine Simard, qui agissait à titre de présidente d’élection pour ce vote. Toutefois, un autre conseiller, M. Yves Gendreau, a également déposé la sienne lors de la dernière journée de la période de candidature. Un vote a donc du avoir lieu entre les conseillers, car M. Boulet ne pouvait plus être élu par acclamation.
Pour expliquer sa candidature, M. Gendreau mentionne qu’il aimerait réviser certains projets controversés de la Ville comme celui de la construction d’un Pavillon multifonctionnel. Il croit que devenir maire lui permettrait de consulter les plans et études de marché auxquels il n’a pas accès depuis plus d’un an. Aussi, il estime que les citoyens devraient être consultés à propos du taux de taxation afin de savoir si ceux-ci préfèreraient une légère augmentation de taxes en retour de plus de services ou si, au contraire, ils aimeraient une légère diminution pour une offre de services moins grande.
Un élu par cooptation
Le vote a finalement lieu lors de la séance du conseil municipal du 10 février dernier avec une égalité entre les deux candidats, de trois voix contre trois. Tel que prévu par la loi, le maire suppléant et candidat M. Boulet a rempli un deuxième bulletin de vote et obtenu ainsi une autre voix en sa faveur pour remporter l’élection.
Le nouveau maire de Montmagny avoue qu’il ne s’attendait pas à devoir utiliser son deuxième vote en tant que président d’assemblée afin de remporter l’élection. Sans prétendre faire l’unanimité, il ne croyait pas que le conseil était aussi divisé sur la question. M. Gendreau, pour sa part, craignait que le vote se termine de cette façon.
Pour autant, les deux adversaires disent ne pas avoir de rancune pour l’autre. « J’ai félicité M. Boulet pour son élection », confie le conseiller Gendreau. Il ajoute que le deuxième vote que son compétiteur obtenait n’a pas généré de frustration chez-lui, car il sait que la loi fonctionne comme cela et il l’accepte. Ni le maire, ni le conseiller ne craignent pas non plus que cette élection cause une tension lors des assemblées. : « On est tous d’accord qu’on doit travailler ensemble », exprime M. Gendreau
« Si on m’avait demandé il y a un an si j’allais devenir maire un jour, j’aurais dit non » – Bernard Boulet
À l’issue du processus, M. Boulet est donc officiellement le successeur de M. Rémy Langevin comme maire de Montmagny et restera en poste jusqu’à l’élection générale prévue en novembre 2021. Il ne se dit pas encore être certain de présenter sa candidature à cette élection.