Publiés dans la revue Energies le 5 avril 2024, ces µPSCs utilisent des organismes vivants pour produire de l’électricité en captant les électrons et les protons libérés durant la photosynthèse. En d’autres termes, le docteur Kirankumar Kuruvinashetti, auteur de l’étude, et son équipe ont fabriqué de véritables micro-usines productrices d’énergie. Mais, ici, pas d’uranium, d’eau, de charbon ou de vent : ce sont des organismes vivants, des algues, qui assurent la production de cette électricité.
Le système développé par les chercheurs se compose de deux petites chambres de 2 cm x 2 cm et 4 mm de hauteur, séparées par une membrane perméable. La chambre de gauche contient des microalgues en suspension, tandis que la chambre de droite renferme du ferricyanure de potassium, une substance chimique, utilisée notamment dans certaines réactions industrielles et de laboratoire. Des microélectrodes ont été développées puis placées de chaque côté de la membrane pour capter les échanges électrochimiques entre les deux compartiments.
Des micro-usines productrices d’énergie
Sous l’effet de la lumière, les algues réalisent la photosynthèse et produisent des électrons et des protons. Une partie de ces électrons est détournée et capturée par les microélectrodes. Dans celles-ci, les électrons se déplacent et créent un courant électrique, semblable à une foule avançant dans un couloir et générant un flux continu.
Les protons libérés traversent, quant à eux, la membrane, entrent dans la chambre de droite et se lient au ferricyanure de potassium. Cette réaction permet au ferricyanure de capter des électrons, ce qui aide à maintenir un flux constant d’électrons dans le système.
Ce dispositif fonctionne aussi la nuit, car les algues continuent de produire des électrons et des protons, non pas par photosynthèse, mais par respiration, c’est-à-dire par la dégradation de molécules.
Les chercheurs de l’étude soulignent que développer ce système a été un vrai défi. « Collaborer avec des biologistes nous a aidés à optimiser le processus de culture des algues, tandis que les scientifiques des matériaux ont contribué à améliorer l’efficacité de capture de l’énergie en utilisant des nanoparticules » indique le Dr Kuruvinashetti.
Maximiser la production d’énergie
Une microcellule ne produit qu’environ 1 V, ce qui est insuffisant pour alimenter des appareils, même à ultra-faible consommation. Pour améliorer les performances des µPSCs, les chercheurs ont donc testé différentes configurations. « Au départ, notre objectif était de démontrer la faisabilité de l’exploitation des algues pour la production d’énergie dans des micro-dispositifs. Avec le temps, les attentes ont évolué, passant de la simple preuve de concept à l’optimisation de la puissance et de l’efficacité du système » précise le Dr. Kuruvinashetti.
Les chercheurs ont donc connecté les µPSCs de diverses manières : en série, en parallèle, ou en combinant les deux, afin de déterminer laquelle générait le plus d’énergie.
Après de nombreuses modélisations et expérimentations, ils ont mis au point un système capable d’alimenter des dispositifs à faible et très faible consommation, comme des capteurs connectés à Internet, des dispositifs de surveillance environnementale et des appareils de santé portables. « Combiner plusieurs µPSCs en série et en parallèle est la stratégie optimale pour obtenir la tension et le courant souhaités », explique le docteur en ingénierie mécanique.
Une nouvelle source d’énergie verte
L’équipe reconnaît que, pour l’instant, les µPSCs ne rivalisent pas avec les méthodes actuelles de production d’énergie. Elles ne génèrent pas suffisamment de puissance et leur performance diminue avec le temps. Des recherches supplémentaires sont prévues. « Optimiser la production d’énergie et l’efficacité des cellules, améliorer les techniques de culture des algues, et explorer de nouveaux matériaux pour améliorer la capture d’énergie font partie des axes de recherches futures » énumère le Dr. Kuruvinashetti.
D’après lui, si l’on parvient à améliorer leur efficacité et leur stabilité, les µPSCs pourraient, à long terme, devenir une source d’énergie durable, capable d’alimenter des appareils plus gros ou des systèmes complexes, et même de fournir de l’électricité dans des zones reculées.
Rappelons que les µPSCs n’émettent aucun gaz à effet de serre et absorbent le CO₂ atmosphérique, ce qui en fait une technologie à empreinte carbone négative. « Cette innovation contribue à réduire l’empreinte carbone des dispositifs électroniques, participant ainsi aux efforts mondiaux de durabilité » conclut Kirankumar Kuruvinashetti.
La photosynthèse La photosynthèse est le processus chimique par lequel les plantes, les algues et certaines bactéries fabriquent leur propre nourriture grâce à la lumière du soleil. En gros, ils utilisent du dioxyde de carbone (CO2) et de l’eau (H2O) et les transforment en sucre (glucose) et en oxygène (O2), selon l’équation suivante : 6 CO2 + 6 H2O → 1 molécule de sucre + 6 O2 Tout commence dans les chloroplastes, de petites organites à l’intérieur des cellules végétales. À l’intérieur de ces chloroplastes, il y a des sacs que l’on appelle, les thylakoïdes. Quand la lumière du soleil arrive sur ces sacs, elle aide à séparer l’eau en oxygène et en petites particules d’énergie, appelées protons et électrons. Ces électrons se déplacent ensuite d’une molécule à une autre, tel un bâton que se passent des coureurs dans une course. À la fin de ce parcours, les électrons sont incorporés dans une molécule très énergétique appelée NADPH. Pendant ce temps, les protons sortent des sacs et traversent des protéines spéciales, ce qui permet de créer une autre forme d’énergie appelée ATP. Une fois que l’ATP et le NADPH sont produits, ils sont utilisés dans un processus appelé le cycle de Calvin. Ici, le dioxyde de carbone est d’abord fixé sur une molécule de ribulose bisphosphate grâce à une enzyme appelée RuBisCO. Cela crée une première molécule de sucre, appelée 3-phosphoglycérate. Avec l’aide de l’ATP et du NADPH, cette molécule est transformée en sucre que la plante utilise pour se nourrir. |