Cette pratique nommée la lutte biologique intégrée, la diplômée en environnement et propriétaire de la compagnie distributrice de prédateurs Limoiland y a été initiée grâce à un simple plant de ciboulette. Confrontée à une infestation tenace, elle a alors elle-même eu recours à cette technique qui consiste à mettre les prédateurs à profit afin de se débarrasser des insectes ravageurs. À l’inverse des produits chimiques qui détruisent sans distinction les organismes nuisibles et bénéfiques, les prédateurs ont l’avantage de s’attaquer spécifiquement à certaines espèces, protégeant ainsi l’écosystème de la plante.

La lutte biologique intégrée comprend non seulement l’ajout de prédateurs dans l’écosystème, mais également l’intégration de stratégies naturelles rendant l’environnement du plant plus adéquat. Alors que la lutte chimique nécessite une dynamique de soustraction des éléments, la lutte biologique intégrée consiste en la reconstitution d’un écosystème plus complet et autosuffisant.
Séréna Bilodeau, bachelière en environnement, designer graphique et propriétaire de l’entreprise Limoiland (photo courtoisie : Limoiland).

Encore plus d’insectes ?

Initialement, l’ajout d’insectes ne semble pas être la solution la plus sécurisante à un problème d’infestation. L’amoureuse des plantes se fait rassurante à ce sujet. Après l’introduction des prédateurs dans l’écosystème, leur capacité à chasser efficacement les parasites permet de contrôler la population nuisible. Une fois que les parasites sont éradiqués, les prédateurs succombent ensuite à l’absence de nourriture.

Les études de l’Institut national de santé publique du Québec (INRS) et Séréna Bilodeau arrivent au même constat : la méconnaissance du sujet en rend plus d’un réticent. L’INRS propose des campagnes de sensibilisation qui porteraient sur la lutte biologique pour changer la perception négative de plusieurs horticulteurs amateurs face aux bestioles qui font finalement partie de la solution.

Les signes d’une infestation d’insectes indésirables sont nombreux. Séréna Bilodeau rappelle que « Si on veut un bio-contrôle, l’idéal c’est de ne jamais perdre le contrôle. »

L’éducation apparaît comme la clé vers la popularisation de la lutte biologique intégrée. Se présentant comme un moyen efficace de se débarrasser, par exemple, des téthranyques rouges et des thysanoptères, les processus de bio-contrôle s’imposent comme alternative à la lutte chimique. Le tout, à condition de partager son habitat avec des bestioles pendant un moment.

Des applications nombreuses
La lutte biologique intégrée est adoptée par les horticulteurs amateurs comme le promeut Séréna Bilodeau, mais les applications possibles dépassent largement le cadre résidentiel. La propriétaire de Limoiland fait d’ailleurs mention de l’intégration de principes de lutte biologique intégrée chez une maraîchère de Frampton l’année dernière pour limiter la propagation d’insectes indésirables: « [La maraîchère] avait des mouches à carottes. On a mis des Stratiolaelaps scimitus et elle a eu une super belle récolte. »
L’intérêt pour le bio-contrôle se reflète dans les stratégies proposées à grande échelle par des entreprises privées: « En production en serre ornementale c’est déjà la norme. », explique Séréna Bilodeau. Des compagnies de gestion parasitaire assurent également une commercialisation de ses principes.
« Si la lutte biologique est révolutionnaire dans le domaine de la gestion parasitaire, elle existe depuis de nombreuses années dans les secteurs de l’élevage professionnel et de l’horticulture. »
– MBM Gestion parasitaire
À plus grande échelle encore, des municipalités emboîtent le pas et optent pour des méthodes de lutte biologique intégrée pour contrôler et prévenir des infestations. Dès 2002, l’Institut de santé publique du Québec estimait qu’ « à la ville de Québec, par exemple, la mise en application des principes de lutte intégrée a permis une réduction de l’ordre de 50 % de l’utilisation de pesticides. »
La lutte biologique intégrée, propulsée par la mise en place de réglementation, s’impose comme la nouvelle norme de gestion horticole chez les amateurs comme dans la production à grande échelle. Pour Séréna Bilodeau, le démantèlement d’idées préconçues sur l’intégration volontaire d’insectes dans l’écosystème des plantes apparaît essentiel à une implantation plus vaste de ces stratégies.