Québec — La transition des journaux papier vers le web met ces médias à rude épreuve. Forcés de s’adapter, les journaux ont dû inclure une plateforme impensable il y a dix ans à peine, la vidéo. Celle-ci n’est désormais plus uniquement un atout des médias télévisuels. Pierre-Olivier Fortin, journaliste vidéo au quotidien Le Soleil pendant près d’un an, raconte cette nouvelle manière de traiter un article.

«Au début, tous les collègues, tous les patrons ne savaient pas trop comment ça [allait] marcher». Le jeune journaliste concède qu’il y a eu une certaine part d’éducation à faire dans le milieu, mais désormais «c’est fait et ça va très bien» affirme-t-il.?

Cette nouvelle plateforme pour un média qui se veut à la base papier change radicalement la manière de traiter l’information, puisque «chaque sujet ne se prête pas nécessairement à une couverture vidéo», tient-il à nuancer. «Il faut que le sujet bouge. Une conférence de presse, où tu n’as que des personnes qui jasent, c’est ennuyeux [visuellement]».

Pierre-Olivier Fortin allègue que c’est la nouvelle manière de traiter l’information, vantant par le fait même les mérites de son média. «C’est l’avantage de faire de la vidéo dans un journal. Les sujets qui sont visuellement ternes, on ne les fait pas en vidéo, ce sont des sujets qui seront davantage couverts par le département de l’écrit.»

«On a le choix, on n’a pas à faire un résumé de l’actualité du jour à 18 h comme à la télévision en incluant même les sujets monotones, mais qui sont importants.» Le jeune reporter ajoute même que le journal va jusqu’à ne pas couvrir certains sujets par écrit pour mieux les traiter en vidéo sur le web, ce qui était inimaginable il y a quelques années.

D’ailleurs, avec les nouvelles réalités du marché et les dernières avancées technologiques, les journaux présents sur le Web peuvent connaître le type de sujet qui fonctionne pour la caméra et ceux qui n’auront pas de succès. Les médias papier peuvent désormais s’adapter en fonction du nombre de «clics» sur leurs pages.

«Pour avoir un million de clics, si on ne faisait que des faits divers, on l’attendrait, mais ce n’est pas nécessairement ça notre mandat en tant que journaliste.» Ce constat amène d’ailleurs un nouveau dilemme à ce type de journalisme, soit celui d’avoir à choisir entre la popularité de l’insolite et le devoir de bien informer les gens.

Un parcours par la télé

Pendant ses études à l’Université Laval, Pierre-Olivier Fortin n’a appris que le traitement de la nouvelle par la couverture papier des évènements. «Une nouvelle, ça commence avant tout par l’écrit, c’est la base de la base», et ce même s’il se disait ouvertement intéressé par les médias télévisuels. «Quand j’ai commencé, je ne pensais jamais qu’un journal [écrit] allait faire de la production de reportages vidéo aussi rapidement.»

Après avoir décroché un stage à Radio-Canada à Québec comme journaliste-recherchiste, il a fait ses premières armes en reportage vidéo. Par la suite, il s’est envolé quelques mois pour Winnipeg, puis est revenu à Québec pour s’installer au canal Vox. Il s’est finalement posé au journal Le Soleil en 2009, où il a dû toucher tous les domaines. «Le multitâche et la polyvalence, ce n’est pas qu’un mythe, c’est de la grosse réalité.» C’est alors que s’est ouvert un poste de remplaçant à la nouvelle section vidéo. Comme il a déjà fait ses classes à la télé, le jeune reporter s’est embarqué dans l’aventure.