L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a décidé de classer le trouble du jeu vidéo ou gaming desorder dans la liste des classifications internationales des maladies (CIM). La liste, qui sera publiée en juin prochain, ajoute cette forme de dépendance à celles en lien avec l’alcool, la drogue, les jeux d’argent et de hasard  Le nombre de joueurs se trouvant dans une situation de dépendance aux jeux vidéo est en croissance, mais la ligne entre la simple adoration d’un jeu et une dépendance envers lui est parfois floue.

Dans sa 11e révision, la Classification statistique internationale des maladies et des problèmes connexes (CIM-11) définit le trouble du jeu vidéo comme une maladie qui est caractérisée « par une perte de contrôle sur le jeu, une priorité accrue accordée au jeu, au point que celui-ci prenne le pas sur d’autres centres d’intérêt et activités quotidiennes » ainsi que « la pratique croissante du jeu en dépit de répercussions dommageables. » L’OMS ajoute toutefois que ce trouble peut être diagnostiqué seulement chez les personnes qui ont adopté ces comportements durant une période de 12 mois.

Ce trouble touche une petite partie seulement des joueurs de jeux vidéo ou de jeu numérique, mais des professionnels de la santé ont vu la nécessité d’agir dans le but de prévenir le risque que ce trouble ne prenne de l’importance. Félix Plante a lui-même été dans une situation semblable pour un jeu en particulier. Il explique ne plus éprouver le même sentiment de besoin excessif, mais que les symptômes qu’il ressentait étaient similaires à ceux dictés par la CIM-11 :

Cela n’a pas pris particulièrement longtemps au joueur avant de comprendre qu’il n’était pas seulement amateur, mais dépendant du jeu. Félix Plante avoue que la peur de perdre les récompenses qu’il avait accumulées dans ses jeux l’incitait à penser souvent au jeu et à y jouer :

« Un jeu, on est censé y jouer pour avoir du plaisir, pas pour se sentir mal quand on n’y joue pas ».

 Des conséquences considérables

Comme pour les autres dépendances, les joueurs atteints du trouble du jeu vidéo ont énormément de difficultés à s’en sortir ; éteindre la console ou l’ordinateur n’est pas toujours suffisant pour faire une croix sur leur dépendance. Geneviève Demers-Lessard enseigne le cours de cyberdépendance à l’Université Laval. Elle note que plusieurs conséquences de la dépendance aux jeux vidéo sont similaires à celles de la cyberdépendance en général, notamment puisqu’il existe plusieurs jeux en ligne. Elle identifie quatre catégories de conséquences : « psychologiques [ou] émotionnelles », « sociales », « physiques » et « professionnelles ».

Par exemple, le joueur peut ressentir un sentiment de vide, un désir d’isolement, prendre du poids, s’absenter de son travail et bien d’autres symptômes. Geneviève Demers-Lessard ajoute que « les habitudes problématiques peuvent conduire à des conflits relationnels parce que, par exemple, le temps passé à planifier et à faire les activités sur Internet peut être au détriment du temps passé à faire des activités familiales ». D’ailleurs, un texte du Département de psychiatrie au Centre hospitalier universitaire vaudois en Suisse mentionne les mêmes conséquences évoquées par l’enseignante.

Quant à lui, Félix Plante avoue ne pas avoir eu une si grande difficulté à sortir de sa dépendance :

Toutefois, il admet qu’il se sentait mieux lorsqu’il quittait le jeu auquel il était dépendant : « À chaque fois qu’il y avait un jeu comme ça qui m’accrochait puis que j’arrivais à désinstaller […], je me sentais apaisé. Je me sentais avec un poids en moins sur les épaules, comme une responsabilité en moins. »

Plusieurs jeux mobiles, comme Pokemon Go, Candy Crush et Angry Birds, ont largement attiré les joueurs. (Crédit photo : Jason Joly)

De l’aide pour les joueurs

Dans de nombreuses régions de la province, des centres de réadaptation aident les personnes dans le besoin et leur famille. Le Centre de réadaptation de dépendance de Québec offre des services pour les personnes dépendantes à l’alcool, à la drogue et aux jeux de hasard et d’argent. De plus, comme le montre madame Demers-Lessard, « bien qu’à ce jour la clientèle en cyberdépendance ne soit pas officiellement dans le mandat du centre, des services sont offerts à cette clientèle puisqu’il y a un besoin à ce niveau ».

Pour ce qui est de la décision de l’OMS, Félix Plante considère que c’est une bonne chose puisqu’il est d’accord pour dire que cette dépendance est réelle et touche plusieurs joueurs :