L’Accord États-Unis–Mexique-Canada (AEUMC, le nouvel ALENA), ouvre le marché canadien des produits laitiers et avicoles. Daniel-Mercier Gouin, Professeur au Département d’économie agroalimentaire et des sciences de la consommation estime que la perte de part de marché pour les producteurs canadiens pourrait atteindre 10 %. La perte de part de marché pour les laitiers canadiens s’explique par l’impact cumulé du Nouvel ALENA et de l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste

L’Accord États-Unis-Mexique-Canada (AEUMC) ouvre le marché laitier canadien aux produits laitiers et avicoles en provenance des États-Unis.

Objet d’un bras de fer depuis plusieurs mois, cet accord qui vient remplacer l’ALENA, a été renégocié à la demande des États-Unis comme il avait été promis lors de la dernière campagne électorale.

Le marché canadien des produits laitiers et avicoles bénéficie d’une protection par le système de gestion de l’offre mis en place en 1972.

La production laitière 20116 au Québec, en chiffres
Nombre des fermes laitières 5473 fermes
Volume de lait produit 3 milliards de litres
Recettes 2.45 milliards
Emplois 83000 emplois
Volume de lait donné aux banques alimentaires 741674  litres
Camions-citernes pour ramassage du lait et livraison aux usines 260 Camions
Fermes certifiées biologiques 114 fermes
Volume de lait certifié biologique 44.7 millions de litres

Source site des producteurs de lait du Québec (www.lait.org)

 

En déterminant des quotas de productions, le système de gestion de l’offre permet une stabilité des prix et limite les importations. Il assure un revenu constant aux producteurs laitiers en les mettant à l’abri des fluctuations de prix.

Pour les producteurs laitiers canadiens, le nouvel ALENA leur porte préjudice. Le président des producteurs de lait de Québec, Bruno Letendre n’en décolère pas. « C’est près de 800 millions de litres de lait qui ne seront plus produits par les producteurs canadiens. L’équivalent de la production annuelle de 1 200 fermes laitières moyennes du Québec, perdu à perpétuité » écrit-il le 1er octobre 2018 dans une lettre adressée à ses collègues en réaction à l’annonce de l’entente.

D’après le Professeur Daniel Mercier Gouin, le Canada n’a pas gagné en contrepartie de ces concessions sur les produits laitiers. Il ajoute également qu’il y a peu de chances que cet accord se traduise par une baisse des prix à la consommation. Cependant, fait-il remarquer, il est possible que des importateurs « achètent du lait à faible prix sur le marché américain pour le revendre à prix élevé sur le marché canadien. Ces intermédiaires pourraient être les seuls gagnants de l’accord. »

Consommer local, une option pour soutenir les producteurs ?

À Québec, plusieurs initiatives ont vu le jour pour sensibiliser à l’idée de consommer local. Si il est possible de trouver des informations pratiques sur ce portail initié par l’Université Laval, il existe également l’initiative du Marché Local UL, tenant lieu tous les ans chaque mardi, de début septembre à début octobre.

Joanie Roy, qui en est l’actuelle chargée du projet, a décidé de s’investir dans la mise en valeur des producteurs locaux et déplore le manque d’importance qui leur est accordée.

« Il faut trouver d’autres moyens d’encourager les gens à consommer local »

Des producteurs comme Mme Florence Lefebvre St-Arnaud des Jardins bio Campanipol estiment que la demande des produits certifiés bio ou des produits locaux est en hausse. Certains consommateurs font le choix des produits locaux au quotidien:

« Il y a une grande tendance au local actuellement (…) C’est plus qu’une mode. C’est ce que les gens recherchent » déclare-t-elle.

Cependant, ce choix des consommateurs en faveur des produits locaux ne saurait en lui-même changer la donne pour les producteurs laitiers selon le professeur Daniel-Mercier Gouin : « Des études ont montré que d’une part, le consommateur opère ses choix plus en fonction du prix affiché que de l’origine et d’autre part, il n’est pas toujours facile de faire la différence entre les produits locaux et les produits canadiens en ce qui concerne le lait » Ce choix des consommateurs en faveur des produits locaux ne saurait en lui-même changer la donne pour les producteurs laitiers selon lui.

« Des études ont montré que d’une part le consommateur opère ses choix plus en fonction du prix affiché que de l’origine et d’autre part en périphérie il n’est pas toujours facile de faire la différence entre les produits locaux et les produits canadiens en ce qui concerne le lait » prévient le professeur.

Et de demander sous forme de boutade « Pour du lait en épicerie, il est simple de connaître sa provenance et de choisir celui de provenance québécoise, mais comment savoir d’où vient le fromage contenu dans une pizza congelée ? »

La ratification du nouvel ALENA se fera dans les six mois suivants sa signature. Le 1er octobre, Bruno Letendre, président de l’Association des producteurs de lait, expliquait déjà que «Les semaines et les mois qui viennent seront donc encore teintés d’incertitude et de turbulence».