Le projet d’étudiants de l’École d’architecture de l’Université Laval de créer un boulevard urbain dans le quartier Saint-Roch est qualifié de « pragmatiquement non réalisable » par Pierre-Luc Lachance, conseiller municipal du district de Saint-Roch–Saint-Sauveur. Mais cette idée intéresse l’administration Labeaume, qui partage certains des objectifs des étudiants. La curiosité du maire pour cette proposition « inspirante » pourrait venir d’un intérêt à repenser ce secteur central de la ville de Québec.

Le boulevard urbain proposé par l’équipe de Maryse Béland, Florence Côté, David Diederich et Maxime Tremblay-Laverdière ferait coexister les piétons, les pistes cyclables et les voitures, mais aussi les autobus du réseau de transport de la capitale (RTC) et un éventuel projet structurant comme un tramway :

Le conseiller municipalPierre-Luc Lachance accueille avec intérêt la proposition des étudiants : « Un projet comme celui-là, ça nous inspire, ça permet de voir le potentiel de quelque chose et ça permet de réfléchir ». Cet intérêt s’est manifesté très concrètement pour l’équipe d’étudiants, qui a eu l’occasion de s’entretenir avec Peter Murphy, conseiller en design urbain à la Ville de Québec, à plusieurs reprises. Régis Labeaume a même assisté à la présentation finale du projet.

 

« Je capote de voir que leur projet pensé sans contraintes vient rejoindre les orientations pragmatiques du programme particulier d’urbanisme » Pierre-Luc Lachance, conseiller municipal de Saint-Roch-Saint-Sauveur

 

Cet intérêt s’explique, selon le conseiller municipal, par les similitudes entre la proposition des étudiants et le programme particulier d’urbanisme de la ville : « On veut calmer la circulation urbaine, faire de la place pour d’autres modes de transports, et c’est ce que les étudiants voient ».

 

L’urbanisation à l’échelle humaine

 

En plus des réflexions sur le sort de l’autoroute Laurentienne, d’autres projets sont déjà envisagés dans le secteur. Aux dires de Monsieur Lachance, « un pôle de transport en commun va s’implanter dans ce secteur-là (Saint-Roch) de façon très significative ». Le RTC a présenté cet automne son projet pour construire le « réseau de l’avenir ». Avec l’annonce imminente du projet de transport structurant, c’est donc une modification significative qui attend ce secteur de la ville. Pour Étienne Grandmont, directeur général d’Accès transports viables, un « organisme à but non lucratif regroupant les utilisateurs, les utilisatrices et les organisations socioéconomiques préoccupés par l’avenir de la mobilité dans la région métropolitaine de Québec », c’est une opportunité de « reconnecter les quartiers entre eux ».

Selon Étienne Grandmont, le projet de boulevard urbain s’inscrit dans une vision plus « humaine » de l’urbanisation. Toutefois, son organisation milite bel et bien pour un boulevard urbain, pas seulement pour l’ajout d’autobus sur le tronçon. Bien qu’il reconnaisse la difficulté d’implantation d’un boulevard urbain, il considère que c’est faisable, comme le démontrent plusieurs exemples réalisés à Montréal ou à Milwaukee. Les images suivantes montrent le projet pensé par les étudiants de l’École d’architecture:

Selon Étienne Grandmont, plusieurs raisons expliquent l’attrait du projet de boulevard urbain proposé par les étudiants. Il mentionne que cela permet d’« augmenter la densité urbaine », de créer des « milieux non dépendants de l’automobile » et d’« optimiser les modes de transports actifs et semi-actifs ». « Les bénéfices pour les citoyens sont hallucinants », conclut-il. Toutefois, comme le rappelle Pierre-Luc Lachance, « il y a plusieurs contraintes budgétaires en matière d’urbanisme ».

 

« On veut que la ville se fasse porteuse d’une vision développée avec les citoyens, d’une vision claire » Étienne Grandmont

 

Étienne Grandmont critique également l’élargissement de l’autoroute Laurentienne annoncé par le gouvernement du Québec en juillet dernier. Il le qualifie de « non-sens » par rapport aux autres orientations de la ville, et déplore que « l’autoroute Laurentienne soit venue séparer les quartiers de la basse-ville ». Pour Pierre-Luc Lachance, l’annonce de l’élargissement n’est pas un non-sens, mais bien le résultat de l’obligation de la ville de devoir « penser à tout le monde ». Il soutient qu’« avec le transport en commun qui va décharger une partie du réseau et l’élargissement de l’autoroute Laurentienne », on peut espérer que « la combinaison des deux va donner le résultat souhaité par tous, soit une plus grande fluidité ».

Étienne Grandmont insiste aussi sur le potentiel de revitalisation commerciale de ces secteurs. Il pense notamment à la place Fleur de Lys et les alentours. De son côté, Maxime Tremblay-Laverdière croit  que Régis Labeaume voit lui aussi un « potentiel important de développement immobilier dans le secteur de Place Fleur de Lys ».

 

Les rues conviviales envisagées par la ville

 

La proposition des étudiants s’appuie notamment sur le concept de « rues conviviales », qui ont pour objectif principal de favoriser l’harmonie et le côtoiement de plusieurs modes de transports. Maxime Tremblay-Laverdière, un des étudiants à l’origine du projet, mentionne que la ville est « très d’avant-garde en matière de rues conviviales ». Elle a notamment réaménagé la rue Anna en 2015. Pierre-Luc Lachance confirme qu’« à chaque fois qu’une réfection est envisagée, une grille d’analyse est remplie pour évaluer la pertinence d’une rue conviviale ».

Mais il mentionne du même souffle que « ce n’est pas toutes les rues qui pourront être conviviales, ni toutes celles de la basse-ville, car il faut mesurer les projets dans l’ensemble des arrondissements ». Cela s’explique notamment par des choix budgétaires, une rue « conviviale » coûtant beaucoup plus cher à construire.

Une chose est sûre. « La ville veut changer sa manière de penser le transport », assure Pierre-Luc Lachance. Une consultation sur la sécurité routière, après celle sur le transport durable et les consultations de la dernière année, est d’ailleurs en ligne jusqu’au 18 mars : « Il faut considérer l’aspect de la sécurité routière pour créer des projets attrayants pour les citoyens », mentionne-t-il. L’objectif est d’ensuite tenir un grand forum de discussion pour finalement déposer une stratégie de sécurité routière en 2019.