Manger des fibres, faire du sport, boire avec modération…et se tenir loin de la cigarette. La génération Y a grandi en entendant cette ritournelle et pourtant, un jeune adulte sur 5 fume. Si l’attrait de l’interdit pousse les jeunes adultes à allumer, c’est surtout le stress et la dépendance qui les fait continuer.

« Fumer, c’est pas bon », martèle depuis des années le chapelet de campagnes visant à éloigner les jeunes de la cigarette. Non sans effets : le tabagisme chez les jeunes adultes est en baisse depuis 1999, passant de 35,7 % à 13,4 % pour les 15-19 ans et de 39,4 % à 22% pour les 20-24 ans selon Statistique Canada.

La baisse est une tendance qui s’observe dans toutes les tranches d’âge depuis le milieu des années 60, constate Mario Champagne, responsable du plan de lutte contre le tabagisme à la Direction de santé publique du CIUSSS de la Capitale-Nationale.

« Avec le temps, fumer est devenu de moins en moins acceptable socialement et les gens ont prôné davantage des environnements favorables et sains. C’est principalement causé par l’ensemble des politiques publiques sur les saines habitudes de vie », explique-t-il.

La faute à qui ?

Si les Y allument malgré tout, c’est parce que l’industrie du tabac use d’« ingéniosité pour s’assurer d’avoir une certaine clientèle », continue l’expert en tabagisme. La mise en marché de produits aromatisés, conjuguée au marketing visant les jeunes, est à mettre au banc des accusés selon M. Champagne.

Les jeunes fumeurs sondés ne nient pas l’impact de ces stratégies, conscients de l’attrait des additifs sucrés et fruités sur leur tranche d’âge. Le cœur du problème réside cependant ailleurs pour eux, notamment dans l’interdiction de fumer que profèrent les campagnes de sensibilisation.

« Quand t’es jeune, on te dit tellement souvent que t’as pas le droit de fumer que c’est sur que tu l’essaies au moins une fois », lance Nicolas Raymond. Pour le jeune barman qui fume un paquet par jour, il est impossible d’enrayer complètement le tabagisme « parce que c’est interdit, et c’est ça qui est excitant. »

Un constat que partage Josiane Breton-Hammarrenger, jeune historienne de l’art et ancienne fumeuse. Spécialement à l’adolescence, âge auquel la majorité des personnes questionnées avouent avoir commencé à fumer, « tout ce qui est contre-indiqué est attirant ».

Surtout que cette interdiction véhiculée par De Facto et autres efforts médiatiques n’atteignent pas forcément leur cible, certains jeunes fumeurs avouant les trouver peu efficaces. C’est l’avis de Jennyfer Boulianne, étudiante en travail social qui a arrêté de fumer il y a quelques semaines.

Un autre facteur expliquant la propension des Y à fumer, c’est son aspect social, explique Nicolas Raymond:

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C’est l’une des raisons pour lesquelles ces fumeurs ne souhaitent pas nécessairement arrêter.  Si beaucoup de jeunes sondés ont commencé à fumer de manière occasionnelle, c’est souvent l’effet de groupe qui les entraîne à continuer et à fumer de plus en plus.  C’est le cas de Marie-Soleil Guérin-Girard, étudiante à la maîtrise en histoire de l’art qui croit que « les fumeurs doivent attirer d’autres fumeurs », et de Jennyfer, qui est d’abord allée vers la cigarette parce que « les gens commençaient à fumer, et que fumer était associé à être cool ».

Le stress comme béquille

Outre la dépendance à la nicotine, le stress est l’un des principaux facteurs qui expliquent que les jeunes adultes continuent de fumer. « C’est une belle béquille », lance Nicolas Raymond, qui avoue parfois s’allumer une cigarette sans s’en rendre compte lors qu’il est anxieux.

Marie-Soleil voit quant à elle le tabac comme « un des principaux compagnons de [s]a journée dans les périodes de stress ». Bien qu’elle désire arrêter au plus tard dans la quarantaine ou la cinquantaine, la jeune femme concède avoir allumé l’une de ses premières cigarettes avant un examen en secondaire I. « Je suis allée prendre des puffs au monde, et on dirait que ça a fait tout de suite une association : je suis stressée, je vais aller fumer une cigarette. »

Il est vrai que le stress et la détresse influencent le comportement d’un fumeur, qu’il soit au courant des méfaits du tabac ou non, confirme Mario Champagne. Si des médecins comme des étudiants sont adeptes des produits du tabac, c’est peut-être qu’ils y trouvent un certain « réconfort par rapport à une carence [qu’ils ont] dans une autre sphère de [leur] vie ».