Québec – Que l’on pense à Xavier Dolan, Denis Villeneuve, Jean-Marc Vallée, chacun à sa façon est en train tranquillement de prendre sa place dans le monde du cinéma américain. Malgré une base bien ancrée à Hollywood, ces réalisateurs ne délaissent pas pour autant le public québécois, public qui, en général, n’associe pas automatiquement le film au réalisateur. C’est pourquoi ils doivent faire appel à différents procédés promotionnels afin de vendre ici ce qu’ils produisent aux États-Unis.

Ce qui rend souvent un film populaire et apprécié du grand public est la perception d’un nombre de personnes ayant eu le privilège de le voir en avant-première, à savoir les médias plus particulièrement les journalistes qui se spécialisent en critiques de film.

Généralement, plus leurs opinions seront bonnes, mieux le film sera perçu en retour par le reste de la population. Plus les gens en parleront entre eux positivement, plus le film aura une visibilité. À l’inverse, un film ayant reçu une mauvaise cote de la presse risque d’être boudé par la population.

« En communication marketing de l’industrie cinématographique, le principal argument de vente d’un film c’est le bouche à oreille. » C’est ainsi que Christian Desilets, professeur agrégé en publicité sociale à l’Université Laval, arrive à expliquer le degré d’intérêt pour les films en général.

Selon monsieur Desilets, cela s’explique notamment par les commentaires des critiques sur Internet et dans les journaux qui ont un impact direct sur l’évaluation personnelle que font les gens d’un film avant de décider si ils iront le voir au cinéma ou non.

L’attention des médias peut s’avérer de bon augure pour les films américains réalisés par des Québécois. En effet, les médias auront souvent tendance à parler davantage d’un film américain lorsqu’un Québécois est impliqué dans le projet, que ce soit le réalisateur, un acteur ou bien une société d’effets spéciaux. Cela s’explique notamment par un élément de proximité entre les producteurs de l’œuvre et la population globale.

Par contre, cet aspect ne peut être au cœur de la stratégie promotionnelle, car comme le souligne monsieur Desilets, cet élément de proximité n’a probablement jamais influencé à outrance les recettes d’un film américain, réalisé par un Québécois, au box-office au Québec.

Selon Robin Plamondon, directeur général du cinéma Le Clap : « Un film comme Sicario (réalisé par Denis Villeneuve), si ce film-là avait été réalisé par un américain, aurait eu beaucoup moins de couverture médiatique, on en aurait beaucoup moins entendu parler à l’avance, donc le public de ce film aurait été beaucoup moins large. »

L’utilisation des médias numériques

Outre la technique du bouche à oreille, la contrainte du marché aujourd’hui force les producteurs de films à se familiariser avec les réseaux sociaux. En effet, des plateformes comme Twitter et Facebook offrent une excellente visibilité aux producteurs pour promouvoir leur film.

Ainsi, un producteur de film dont la maison de production sait faire une bonne utilisation des réseaux sociaux pour promouvoir son œuvre risque de générer davantage d’intérêt qu’une maison de production qui se contente d’une simple bande-annonce à la télévision.

De plus, comme certains films n’ont pas forcément le même budget promotionnel que les gros blockbusters à Hollywood, les médias sociaux parviennent ainsi à jouer un rôle-clé dans la promotion d’un film quelconque.

Par exemple, dans le cas de films américains Prisoners, réalisé par Denis Villeneuve, et Dallas Buyers Club, réalisé par Jean-Marc Vallée, ceux-ci n’ont pas eu la même promotion que des films comme Star Wars, Terminator ou Jurassic Park. Grâce à une utilisation abondante des réseaux sociaux, les réalisateurs ont pu créer un certain engouement pour le film autant aux États-Unis, qu’au Québec.

De plus, il ne faut pas négliger l’apport des émissions locales quand il est question de la promotion québécoise de films américains réalisés par des Québécois. Une émission comme Tout le monde en parle a permis à Denis Villeneuve, Jean-Marc Vallée ou Xavier Dolan et bien d’autres de faire la promotion locale de leurs films.

L’importance des vedettes

Le second élément qui peut augmenter l’intérêt des gens pour un film s’explique souvent par la présence de vedettes hollywoodiennes. « Les gens vont souvent voir un film pour des vedettes, mais je ne pense pas qu’il y a une dimension nationaliste pour autant, du moins je ne l’ai pas vu », explique Christian Desilets.

Ainsi, ce sont principalement les acteurs qui ont un contrôle sur la popularité du film, car ce sont eux que le public voit en premier. Il est donc difficile parfois pour les réalisateurs, en particulier au Québec, d’obtenir une bonne visibilité et une reconnaissance à moins d’avoir une réputation solide qui peut prendre plusieurs années à s’établir. Cela s’explique notamment par l’attachement émotionnel des cinéphiles aux acteurs ce qui les fait souvent oublier les gens derrière les caméras.

Toutefois, force est d’admettre que les réalisateurs québécois ont eu la main heureuse jusqu’à présent, puisque leurs films américains ont mis en scène des vedettes très populaires d’Hollywood. On a qu’à penser au Hugh Jackman, Jake Gyllenhaal, Benicio Del Toro, Matthew McConaughey de ce monde qui ont tous été des acteurs de premier plan dans des films tel que Dallas Buyers Club, Sicario et Prisoners.

De plus, si les cinéastes québécois se retrouvent éventuellement à la tête de blockbusters américains, il est légitime de croire que cela aura un impact sur leur notoriété, non seulement à Hollywood, mais également à une échelle plus internationale dont au Québec.

D’ailleurs il sera possible d’observer ce phénomène prochainement, puisque Denis Villeneuve a été engagé pour réaliser la suite du célèbre film de science-fiction : Blade Runner.

Une question de « timing »

La recette du succès d’un film dépend également d’un autre facteur important mais souvent sous-estimé par les producteurs : le temps. En effet, un film très attendu au cinéma que ce soit en raison des acteurs, du scénario présenté, du réalisateur et qui sort en salles en même temps que plusieurs autres films tout aussi attendus risque de voir sa recette financière affectée par un problème de « timing ».

« La performance du film dépend grandement de la date de sortie de film. Parfois un film de très belle qualité ne performera pas parce qu’il va sortir une fin de semaine en même temps que 3 ou 4 autres films très attendus », explique monsieur Robin Plamondon.

Mais, malgré cette offre impressionnante de films, les graphiques ci-dessous démontrent bien que les réalisateurs comme Denis Villeneuve et Jean-Marc Vallée parviennent à bien vendre leurs films autant québécois ou américains, et ce malgré les contraintes du marché.

Graphique sur les recettes au box-office québécois Crédits : Thomas Thivierge/Exemplaire
Graphique sur les recettes au box-office québécois de films de Denis Villeneuve Crédits : Thomas Thivierge/Exemplaire Sources: boxofficequebec.com