Visages déchus, accablés, les images des réfugiés entassés dans un bateau font le tour du globe. La crise migratoire absorbe l’intérêt du monde depuis plusieurs mois maintenant. Mais alors que, du côté européen, l’accueil et la régulation de ces réfugiés inquiètent et posent problème, pour d’autres nations, ces hommes, ces femmes et enfants sont porteurs d’avenir.
Tandis que le Canada est au cœur des discussions à l’égard du nombre de réfugiés que le pays peut accueillir, d’autres pays arctiques, plus modestes,se soulèvent face à cette crise. Au-delà du cercle polaire, des propositions émergent. Portées par les valeurs humaines, certaines régions arctiques sont prêtes à ouvrir leurs terres — parfois isolées et glaciales — et saisir l’opportunité de se développer.
Carte interactive pour bien localiser les lieux :
Depuis peu, l’Arctique est devenu une « option » pour les réfugiés. Au lieu de prendre un bateau et espérer traverser la Méditerranée, certains choisissent la route de la Russie pour rejoindre la Norvège. Les derniers mètres jusqu’à la frontière se font en vélo, puisque la traversée à pied est illégale.De Moscou, ce sontun peu plus de 2 000 kilomètres qu’il faut parcourir à travers la taïga, afin d’arriver au poste de frontière de Storskog situé à l’extrême nord de la Norvège.
De là les autorités, par manque d’expérience mais aussi d’infrastructures, redirigent les réfugiés vers la capitale : Oslo. Stein Kristian Hanson, responsable du poste-frontière, interviewé par Benjamin Illy, journaliste du service reportage pour France info, se confie :
« Cette année, nous avons eu 227 réfugiés qui ont traversé cette frontière de la Russie vers la Norvège. Les années précédentes on avait cinq ou dix réfugiés par an. C’est un vrai défi pour nous, car tout le monde peut voir qu’ici ce n’est pas un gros poste-frontière. Nous n’avons pas les infrastructures, nous ne pouvons pas les garder, alors nous les renvoyons vers les services du gouvernement à Oslo! »
Svalbard, éventuelle terre d’asile
Le gouvernement norvégien accueille un peu moins de 47 000 réfugiés, selon les chiffres de l’Agence des Nations Unies. Une des solutions exposées par les politiques du pays serait d’envoyer une partie des réfugiés sur l’un des territoires oubliés de la Norvège : les îles arctiques de Svalbard.
« L’Europe est en feu, et nos valeurs ainsi que nos normes éthiques sont mises à l’épreuve » a indiqué EspanKlungsethRotevatn, chef du parti écologiste norvégien. Lors d’une entrevue pour le journal local Vårt Land, il expliquait que la construction d’un centre d’accueil permettrait de créer de l’emploi, en plus de l’exploitation de mine de charbon, secteur industriel principal pour Svalbard.
Cependant, l’archipel n’étant pas intégré à l’Espace Schengen, le projet pourrait s’essouffler. Outre ces problèmes de légalité, les conditions météorologiques et la supériorité numérique des ours polaires n’arrangent rien, et rapprochent la proposition de la fiction.
Encore figurant sur le plan de l’accueil des réfugiés, Svalbard prête main-forte à la Syrie et, devient l’acteur principal de la conservation des cultures syriennes. En effet, l’archipel ouvre les portes de la Réserve mondiale de semences, plus connu sous le nom de « L’Arche de Noé végétale ». C’est à l’intérieur d’une montagne que seront conservées précieusement les graines des espèces cultivées en Syrie.
Islande, une manifestation « massive »
Un peu plus au sud de Svalbard, entre la Norvège et le Groenland, l’Islande étonne par ses habitants, et l’intérêt que ces derniers portent à la vague de réfugiés. Depuis le 30 août, les Islandais se mobilisent massivement au travers d’une page Facebook. Ils souhaitent obtenir de leur gouvernement la réévaluation du nombre de demandeurs d’asile, limité à 50 cette année.
La réponse du gouvernement ne s’est pas faite attendre comme le rapporte l’hebdomadaire islandais Kjarninn. Vingt-deux députés ont demandé au parlement de renforcer le soutien aux réfugiés en offrant, cette année, l’asile à 100 réfugiés. Le quota augmenterait ensuite à 200 pour l’année prochaine et l’année 2017. La décision sera ensuite prise en fonction de l’économie du pays.
« Naturellement nous essayons d’accélérer le processus, mais, dans le même temps, c’est très clair qu’à l’heure actuelle, ni nous, ni l’Union européenne ne pouvons aider tous ceux qui sont en difficulté », a indiqué Gunnar BragiSveinsson, le ministre des Affaires étrangères, à RÙV, le service public de radio et télévision islandaise.
Des pourparlers s’engagent donc dans un contexte favorable puisque plus de 10 000 Islandais sont prêts à ouvrir leur maison.
Groenland, entre espoir et réalité
Un peu plus à l’ouest de l’Islande, le Groenland, ce territoire Danois qui malgré son inlandsis – une masse de glace qui couvre une majeure partie de l’île – pourrait accueillir des réfugiés.
« Nous sommes dans le processus de la recherche pour les terres et les bâtiments du gouvernement » rapporte Søren Espersen, Parti du Peuple danois. C’est labase navale abandonnée de Kangilinngui qui est visée. L’ancienne base navale pourrait accueillir 300 réfugiés. Elle est équipée d’une clinique, ainsi que de salles de classe. Même si la proposition a été soumise par M. Espersen au premier ministre du Danemark, Lars Løkke Rasmussen, il semble que le pays ne puisse se permettre d’accueillir des réfugiés.

La réalité rattrape cette proposition, et les inquiétudes s’installent quant à l’accueil possible de réfugiés. « Le pays est déjà confronté à une pénurie de logements, un manque d’emplois et tant d’autres problèmes, je vois difficilement comment le Groenland peut accueillir de nombreux réfugiés », a indiqué Aleqa Hammond — représentante du Groenland, à l’assemblé danoise — au journal hebdomadaire groenlandais AG avant de reconnaitre que les réfugiés « ont besoin d’avoir un endroit pour vivre, quelque chose à manger, être intégrés, éduqués, et avoir accès aux services sociaux. »
La crise migratoire ne se cantonne pas qu’en Europe, elle s’étend à l’échelle internationale. Malgré un emplacement trop souvent lointain, et des conditions de vies rudes, les pays arctiques se sentent touchés par cette vague humaine en détresse. Faisant abstraction de ces obstacles, des solutions émergent. Cependant, accueillir n’est pas suffisant, il faut assurer un avenir à ces hommes, ces femmes, et ces enfants.




















