Le monde de la télévision est souvent idéalisé, mais sa réalité n’est pas toujours aussi belle. Être un enfant et devenir comédien n’est pas comme s’inscrire au hockey ou à des cours de musique comme tous les autres enfants. Cette décision implique pour les parents une foule de responsabilités supplémentaires pour permettre à leurs jeunes de s’épanouir de façon saine dans ce milieu.

Enfant-artiste dès l’âge de 8 ans, Jessica Barker, qui fête cette année ses 30 ans de métier, a grandi au petit écran sous l’œil des téléspectateurs québécois. Elle a eu la chance d’avoir des parents qui ont gardé ses biens financiers dans un compte jusqu’à ses dix-huit ans et pour qui les études étaient une priorité. Bachelière en cinéma de l’Université Concordia, Jessica Barker est l’une des rares à avoir commencé si jeune, et qui encore aujourd’hui, exerce le métier de comédienne. Pourquoi? Les raisons sont nombreuses. Elle qui aime bien se nommer « la péteuse de balloune » raconte que pour certains enfants leur parution glorieuse à la télévision québécoise s’est transformée en histoire d’horreur.

Les chiffres parlent

En 2014, 166 enfants québécois étaient sous les yeux des projecteurs et généraient plus de 4 millions de dollars en revenus. Il y a dix ans, il s’agissait tout au plus de 1 million de dollars.

Arrivé à un âge plus mature, à un moment décisif dans la vie d’un jeune adulte, des enfants-artistes se sont retrouvés avec des comptes en banque… vides (!). Argent dérobé par les parents pour payer des voyages dans le sud, des hypothèques, des voitures et… la liste est longue! Ces enfants peuvent d’ailleurs souvent être victimes de leurs talents et poussés par leurs parents malgré parfois un désintérêt pour ce métier. Des montagnes russes d’émotions et des problèmes psychologiques peuvent également s’ensuiver. Des histoires courantes, a raconté Jessica Barker.

C’est cette réalité qui l’a motivée à créer une fiducie dans l’Union des Artistes pour protéger financièrement les enfants-artistes. Un métier très payant pour des enfants qui n’ont pas la notion de l’argent. Après cinq ans de travail sur la concrétisation de ce projet avec l’UDA, l’entrée en vigueur officielle de la fiducie est maintenant prévue pour janvier 2016, selon Jessica Barker.

Parents d’enfants-artistes, ou gestionnaires ?

Accepter ou décider d’inscrire son enfant dans une agence implique de nombreuses responsabilités pour les parents. Les impôts sont un élément important dans la gestion du travail de ces enfants. Une négligence, un oubli ou un manquement de la part des parents à ce propos peut apporter de mauvaises surprises à ces jeunes, plusieurs années plus tard. Comme l’explique Jessica Barker, il faut se méfier. Comme les adultes, les enfants doivent déclarer leur revenu et payer de l’impôt, s’ils ont un impôt à payer. Elle raconte que des jeunes se sont retrouvés avec des sommes faramineuses dues aux gouvernements en raison d’impôts impayés.

Le succès de certains jeunes les mène même jusqu’à arrêter l’école après l’âge légal de 16 ans. Toutefois, madame Barker raconte que le succès n’est malheureusement pas éternel. Il y a donc de nombreuses personnes qui se retrouvent après un certain temps sans contrats et sans diplôme d’études secondaires et donc incapable de se trouver un emploi à la hauteur.

Les exceptions font la règle!

Ces cas sont malheureusement fréquents, mais ne s’appliquent heureusement pas à tous.

Geneviève Jodoin, mère de ces enfants-artistes, explique que ça demande beaucoup de gestion, qu’« il faut avoir un horaire atypique ou être mère à la maison, parce que ce n’est pas évident ». De plus, elle se dit chanceuse puisqu’elle a deux « bolles ». Les garçons , encore au primaire, doivent manquer de l’école régulièrement, mais ils apportent les devoirs à la maison et arrivent à bien réussir quand même. En ce qui concerne les montants d’argent amassés, tout est placé dans un compte REE pour leurs études ou encore pour qu’ils se paient des choses réellement importantes pour eux, comme un voyage en Tunisie pour Jules avec un ami et sa famille. Il n’est pas question de piger dans ce compte pour se « payer un nouvel iPod parce qu’ils ont bien travaillé », a avoué Geneviève Jodoin, qui est fréquemment témoin d’histoires du genre de la part d’autres parents. Pour la mère, leur réussite scolaire et leur plaisir dans ce qu’ils entreprennent sont les priorités.