Un sondage de la firme Angus Reid annonce que la cote de popularité du premier ministre, Justin Trudeau, a chuté au cours des dernières semaines. Certains médias expliquent ce recul par le dernier voyage en Inde de la famille Trudeau, qui s’est déroulé du 17 au 25 février dernier. Pour Guylaine Martel, experte en analyse du discours médiatique à l’Université Laval, ce voyage ne peut expliquer à lui seul cette baisse.

Selon l’experte, Justin Trudeau en a mis un peu trop. « Il a pu utiliser son casting de vedette pour faire oublier ce qui marche moins bien. Je pense qu’il s’est trompé et qu’il en a trop fait », avance-t-elle. Néanmoins, par expérience, la professeure de l’Université Laval affirme qu’il n’y aura pas d’impact à long terme pour le premier ministre.

La surexploitation de l’image par Justin Trudeau, « ça lui est reproché rapidement, mais je pense aussi que ça va être oublié rapidement », mentionne l’experte en analyse du discours médiatique.

Le voyage entrepris par Justin Trudeau en Inde, le dernier depuis le passage de Stephen Harper en novembre 2009, avait pour but premier de tisser des liens étroits et des partenariats commerciaux avec le deuxième pays le plus populeux au monde, confirme le Cabinet du premier ministre, dans un communiqué. Des résultats de sondage semblent souligner que son escapade de huit jours n’a pas été un succès aux yeux de la population canadienne.

The Washington Post, Reuters et la BBC sont quelques-uns des nombreux médias de premier plan à dénoncer haut et fort les agissements du premier ministre canadien en Inde. Parmi les reproches adressés à Justin Trudeau, on y retrouve principalement le choix des habits traditionnels, ainsi que la controverse entourant la présence du nom de Jaspal Atwal, homme d’affaires accusé de tentative d’assassinat en 1986, sur une liste d’invités.

Des impacts mineurs à long terme

Certaines critiques adressées à Justin Trudeau, en images

  1. L’arrivée de Justin Trudeau s’est faite de façon remarquée, alors qu’un ministre de seconde classe l’a accueilli.
  2. Les tenues vestimentaires de la famille Trudeau ont aussi beaucoup fait jaser en Inde.
  3. L’invitation d’un extrémiste sikh, Jaspal Atwal, à une soirée.

Pour en savoir plus sur les diverses événements, vous pouvez consulter la carte ci-dessous en appuyant sur l’onglet En savoir plus.


 

Divergence d’opinions en Inde

Du côté de l’Inde, les réactions sont plutôt divisées sur la question. Certains articles parus dans The Times of India ainsi que quelques politiciens indiens dénoncent et exposent les agissements du premier ministre, qualifiant son voyage « d’aventure Bollywoodienne ».

Représentant permanent et député ambassadeur de l’Inde à la Mission permanente à New York, Tanmaya Lal n’est pas du même avis que les autres :

« Bien sûr, le public et les médias ce sont enflammés lorsqu’ils ont vu le premier ministre habillé d’une telle façon. C’est normal puisqu’aujourd’hui un simple écart de conduite est facilement pointé du doigt par plusieurs. Pour ma part, et l’opinion des autres membres de diplomates en relation avec les différents pays, dont le Canada, ce que le premier ministre Justin Trudeau a fait n’est rien de plus qu’une tentative de respecter notre culture. Certains l’ont vu d’une mauvaise, façon, et d’autres comme moi, non », explique-t-il.

Notre journaliste, Julien Girard, accompagnant l’Association pour la Simulation des Nations Unies de l’Université Laval au Bureau de la Mission permanente de l’Inde aux Nations Unies, à New York. Crédit photo : Frida Misago

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Quant à de futures ententes économiques entre l’Inde et le Canada, Tanmaya Lal reste prudent. « Je ne suis pas le plus grand expert sur la question puisque j’entretiens des liens plus serrés avec les États-Unis, mais puisque je suis en constante collaboration avec mes collègues du Canada, je sais que le voyage du premier ministre canadien a certainement permis de renforcer, mais surtout créer de nouveaux partenariats économiques, autant bénéfiques pour le Canada que pour nous, qui, dans quelques dizaines d’années, serons le pays le plus populeux au monde selon plusieurs experts ».

 

L’importance de l’image pour Justin Trudeau 

« Lui, il arrive comme une rockstar », remarque la professeure du département d’information et de communication au sujet de premier ministre. Guylaine Martel constate qu’il est l’un des premiers politiciens à se mettre autant en scène, « un peu à l’image d’une vedette. »

L’importance de l’image s’explique socialement, souligne l’experte en analyse du discours médiatique.  « On met de plus en plus l’accent sur la personne du politicien, plus que sur les partis ou les programmes », croit-elle, en ajoutant qu’il y a 40-50 ans, la majorité des électeurs votaient de façon continue pour un seul parti, «ça, ça n’existe plus aujourd’hui. »

À ses yeux, les premières années en politique de Justin Trudeau ont été basées sur la création de son identité personnelle, plus que professionnelle. Guylaine Martel rappelle qu’il projetait l’image d’un bel homme, jeune, avec une belle famille et une femme amoureuse, des aspects importants pour l’électorat, explique-t-elle.

Toutefois, depuis son élection en 2015, l’identité du premier ministre du Canada s’est modifiée, affirme la professeure de l’Université Laval, faisant une plus grande place à l’identité professionnelle. Elle estime que l’importance de l’identité personnelle de Justin Trudeau, aujourd’hui, s’ajoute à ses politiques et ses idées, sans toutefois prendre le dessus. « Quand on va voter, qu’est-ce qu’on retient de tout ça ? Je ne pense pas que ce soit juste pour l’image », conclut-elle.