Certains gouvernements africains entravent le fonctionnement des rédactions locales. Les médias occidentaux tendent quant à eux à annoncer des chiffres alarmants, renforçant le risque de psychose.

Depuis le début du mois de septembre, plusieurs publications du Liberia font l’objet de menaces, d’entraves à leur bon fonctionnement ou de fermeture par les autorités. Certaines sont même accusées de “porter atteinte à la sûreté de l’État”. Pour le président du Syndicat national de la presse du Liberia, « les médias sont devenus les victimes collatérales des mesures prises par le gouvernement ». Ces atteintes à la liberté d’information ont été dénoncées par des organisations telles que Human Rights Watch, Reporters sans Frontières mais aussi par le Comité pour la Protection des Journalistes qui appellent les gouvernements des pays touchés à « garantir la protection des droits en tant qu’élément crucial de leur stratégie de contrôle de l’épidémie d’Ebola ».

Une épidémie médiatique à relativiser

Souvenez-vous de la grippe H1N1 de 2009. L’OMS avait annoncé à l’époque qu’un tiers de la population mondiale pourrait être touchée. Le nombre de doses de vaccins commandés avait atteint des records et finalement l’épidémie annoncée ne s’est jamais produite. En ce qui concerne Ebola, l’OMS estime que d’ici le 2 novembre prochain, si la tendance ne s’inverse pas le nombre de cas pourrait être de 20 000. Un centre de recherche américain estime, quant à lui, qu’il faudrait multiplier les chiffres actuels par 2,5 pour avoir une estimation juste de la crise Ebola. Face à ces chiffres alarmants, il faut noter que début septembre, alors que la presse annonçait plus de 1 200 victimes sur six mois, l’OMS n’en recensait que 788.

Si Ebola continue de se propager en Afrique de façon inquiétante, c’est loin d’être le virus le plus meurtrier du continent. Le nombre de victimes du paludisme, de la dengue ou de la rougeole est nettement supérieur, le paludisme a fait plus de 600 000 victimes en 2012. Il faut aussi noter que la réaction face à la propagation du virus a été très lente : les premiers cas d’Ebola, en Afrique de l’Ouest remontent à décembre 2013.

Quand la réalité rejoint la fiction

Les images des personnels vêtus de combinaisons et de masques de protection au contact de population infectée par un virus peuvent sembler proche d’un récit de science-fiction, tout droit sorti d’un film hollywoodien. Au cinéma, la menace de crise sanitaire sur la planète due à un virus inconnu est un thème récurrent. Parmi les nombreux exemples, Contagion de Steven Sodorberg (2011), Carriers (Infectés) de David et Àlex Pastor (2009) ou en encore Alerte! de Wolfgang Peterson (1995), peuvent être cités. Ce dernier exemple compte un certain nombre de similitudes avec la crise actuelle. Toutefois, Ebola est loin d’être une fiction, c’est un virus bien réel.

Pour lutter efficacement contre Ebola, les populations locales doivent être bien informées sur la propagation du virus. Mais les médias locaux et internationaux doivent aussi éviter de tomber dans le piège du scénario catastrophe.

Lire l’éditorial de notre dossier « Ebola, une épidémie médiatique », également accessible sur le site WordPress du groupe Actualité internationale.