La violence par armes à feu est l’une des plus grandes problématiques identifiées aux États-Unis. Selon l’association militante Everytown, ce sont 96 Américains qui sont tués chaque jour par armes à feu, et plus d’une centaine qui en sont blessés. Depuis les récentes fusillades, une certaine prise de conscience de ce problème émerge au sein de la population américaine. On retrouve désormais de nombreuses organisations qui militent pour le contrôle des armes à feu, et particulièrement pendant la période des dernières élections de mi-mandat. Mais les actions menées par ces regroupements sont-elles vraiment efficaces auprès des citoyens et de la classe politique ?

La fusillade dans une école de Parkland (Floride) en février dernier a fait beaucoup réagir au sein de la population américaine, et particulièrement auprès des jeunes, qui sont régulièrement les cibles de ces attaques. Cet événement a notamment vu la création du groupe militant March for Our Livesmis en place par des adolescents rescapés de cette fusillade. L’envergure de ce groupe, qui a été rejoint par de nombreuses personnalités et politiciens, a d’ailleurs relancé le débat sur le contrôle des armes à feu.

L’association Everytown a répertorié plus de 76 fusillades dans des écoles américaines depuis le début de l’année 2018, comme l’illustre cette carte :

Encore plus récemment, la fusillade dans une synagogue de Pittsburgh (Pennsylvanie) a remis la question en jeu lors des élections de mi-mandat. Le 29 octobre dernier, la communauté universitaire de la New York University (NYU) a d’ailleurs organisé une vigie en hommage aux victimes de cette attaque.

Les New-Yorkais en faveur d’un contrôle des armes à feu

Selon Steven Billet, expert sur la question du contrôle des armes à feu et professeur en sciences politiques à la George Washington University, la possession d’armes à feu est très ancrée dans la culture américaine, notamment car elle est proclamée par le Second Amendement de la Constitution :

« Une milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d’un État libre, le droit qu’a le peuple de détenir et de porter des armes ne sera pas transgressé ».

Selon de récents sondages, le contrôle des armes à feu n’est pas l’enjeu le plus important pour les Américains lors des élections de mi-mandat, puisqu’il se retrouve souvent éclipsé par les questions d’immigration. Mais comme le mentionne Steven Billet, « pour certains groupes, il n’y a pas de doute que ça le soit ».

Et les New-Yorkais admettent qu’il existe un manque de prise en compte de cette question par les instances gouvernementales, et qu’un changement devrait s’opérer.

 

 

Les regroupements pour le contrôle des armes à feu, un nouveau contre-pouvoir

Cette prise de conscience de la part de la population américaine explique l’émergence d’une multitude d’associations qui militent pour le contrôle des armes à feu. Au sein de ce paysage militant, on retrouve des groupes très spécialisés, tels que New Yorkers Against Gun Violence Moms demand actionsqui a une antenne dans chaque grande ville, mais aussi Gays Against Guns

Lors de la période électorale, ces groupes ont été très présents pour mobiliser des votants, utilisant les mêmes moyens d’action que la National Rifle Association (NRA), une association qui défend le droit de posséder et de porter des armes, et qui est reconnue comme un puissant lobby auprès du gouvernement républicain actuel. Mais « [cette] communauté de la réforme n’a pas été très bien organisée et n’a certainement pas réuni assez d’argent pour être compétitive face à la National Rifle Association », admet Steven Billet.

En plus de ces associations, certaines initiatives ont déjà été prises au sein de la classe politique, puisqu’il existe des organismes institutionnels qui militent pour la réduction de la violence par armes à feu. En 2017, le maire de New York Bill de Blasio a notamment créé The Mayor’s Office to Prevent Gun Violencesoit un bureau spécialisé sur la prévention de la violence par armes à feu.

Leur mission est de « coordonner les différentes initiatives prises pour la réduction de la violence par armes à feu, tout en menant à bien des politiques et des rapports d’analyse sur ce phénomène, et formuler des recommandations pour les instances judiciaires », explique Eric Cumberbatch, directeur exécutif de ce bureau. Ce travail s’effectue en grande collaboration avec les associations qui militent pour un contrôle des armes à feu dans la métropole. En 2019, The Mayor’s Office to Prevent Gun Violence va continuer son programme d’actions grâce à un nouvel investissement de 34 millions de dollars de la part de la ville.

 

Un projet de loi qui n’est pas près de voir le jour

Une véritable mobilisation pour un contrôle des armes à feu existe donc au sein de la population américaine, qui souhaite voir un projet de loi à ce sujet. Mais comme le rappelle Steven Billet, « c’est important pour beaucoup de gens, mais une des choses que nous avons découvertes, c’est que les partisans de la réforme des armes à feu ne disposent pas du pouvoir politique nécessaire pour faire avancer les choses ».

Steven Billet explique pourquoi l’établissement d’un projet de loi à ce sujet serait difficile avec le gouvernement actuel.

 

 

Pour le révérend Romall Smalls, rencontré lors de la vigie pour les victimes de la fusillade de Pittsburgh, « tellement de personnes sont impliquées et protestent, et cela montre qu’il y a une grande majorité de personnes aux États-Unis qui sont vraiment impactées, affectées, et fatiguées de cette violence par armes à feu ».