Conflit Israël-Hamas :
la guerre à la désinformation

Des vidéos qui représentent mal la réalité, des vidéos truquées ou des traductions erronées, ne sont que quelques exemples du type de désinformation qui circule actuellement sur les différents réseaux sociaux numériques comme TikTok, X (anciennement Twitter), Instagram et Facebook. Cependant, la forme du contenu de désinformation n’est pas pareille sur chaque plateforme.

« Il y a énormément de contenus de désinformation sur TikTok, les jeunes sont confrontés à de la désinformation qui s’adapte au médium qu’il consulte », affirme Dre Ghayda Hassan, experte en polarisation sociale, psychologue clinicienne et professeure de psychologie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Elle est également directrice du Réseau des praticiens canadiens pour la prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent, en plus d’être cotitulaire de la Chaire UNESCO en prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violents.

Concernant les créateurs de contenus de désinformation qui sont actifs sur TikTok, Ghayda Hassan explique que ceux-ci produisent de courtes vidéos qui souhaitent provoquer d’importantes réponses émotionnelles chez l’auditoire. Elle explique également que quelqu’un qui souhaite délibérément promouvoir une fausse information en ligne s’adaptera au médium et au public qu’il souhaite rejoindre. C’est-à-dire que si l’on souhaite rejoindre un auditoire plus jeune, le contenu de désinformation sera adapté à des vidéos courtes et dynamiques, qui seront diffusées sur TikTok. Par contre, si l’on souhaite plutôt rejoindre des personnes plus âgées, la fausse nouvelle sera majoritairement publiée sur Facebook en s’assurant qu’elle est adaptée dans un format plus convivial pour les gens qui utilisent ce médium.

Selon la professeure de l’UQAM, la raison qui explique la présence d’éléments choquants dans une grande majorité des contenus de désinformation est qu’on tente de jouer avec la sensibilité des gens. Lorsqu’on est confronté à l’image d’un enfant blessé ou d’une explosion qui a fait plusieurs blessés, le côté « spectaculaire » de ces images augmentera le nombre de partages. Il sera donc énormément difficile de rétablir la vérité, en raison de la rapidité de propagation d’une fausse nouvelle, lorsque comparée à un article de fact-checking .

Un sujet sensible au Québec

Selon Ghayda Hassan, un élément qui pourrait expliquer le grand intérêt de ce conflit dans les médias québécois et chez la population québécoise, comparé à d’autres événements internationaux, est la proximité historique du Québec avec ces deux peuples.

« Le peuple juif a une proximité historique avec la ville de Montréal depuis longtemps, et il y a plusieurs personnes d’ascendance palestinienne ou arabe au Québec. Ils ont donc une très grande sensibilité aux images qu’ils voient sur les médias sociaux. »

Il s’agirait donc d’une situation propice à la propagation de fausses nouvelles. « Beaucoup de gens ont des biais de confirmation et lorsqu’ils sont confrontés à une information qui ne penche pas dans leur ligne de pensée, il refuse parfois d’accepter la vérité », souligne la psychologue.

L’importance de rester neutre

Concernant la prudence de certains médias à utiliser ou non certains mots dans la couverture des événements de ce conflit, Ghayda Hassan affirme qu’il est évident que cela provoque de vives réactions chez certaines personnes.

« La personne qui va tenter de rester neutre dans un conflit comme celui-là va toujours être accusé de supporter ou prioriser un camp par son adversaire », mentionne l’experte en polarisation sociale.

En effet, plusieurs médias sont réticents à l’utilisation de certains mots polarisants comme « guerre », « génocide » ou encore « groupe terroriste » dans leurs traitements de l’information. Un choix prudent selon Ghayda Hassan qui réaffirme l’importance de ne pas tomber dans une couverture spectaculaire ou biaisée, si l’on souhaite que la population puisse continuer à s’informer de façon juste et précise.

Le danger de la radicalisation

Toujours selon la professeure en psychologie de l’UQAM, un danger de l’importante présence de la désinformation sur certains réseaux sociaux numériques est la radicalisation de certains individus.

Elle explique que dans un contexte aussi sensible, certaines personnes qui sont fortement idéologiquement engagées dans ce conflit pourraient se radicaliser de plus en plus, selon les contenus auxquels elles sont confrontées. C’est donc pourquoi il est important que les géants du web s’assurent de lutter activement contre les fausses nouvelles présentes sur leurs plateformes.

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