Pour mieux comprendre le fonctionnement du système politique américain, nous avons rencontré Hans Noël, professeur de politique américaine à l’université Georgetown de Washington D.C. Selon lui, le seul moyen pour les partis tiers de pouvoir défendre leurs idées face aux Républicains et aux Démocrates serait de changer les orientations de ces partis de l’intérieur, notamment en participant à leurs primaires.

Voter pour un petit parti a-t-il des conséquences sur le résultat de l’élection ?

TRADUCTION

« Il y a deux grands partis et si vous préférez un parti tiers, vous pouvez voter pour ce parti, mais cela ne va pas influencer le résultat. C’est l’un des deux grands partis va gagner. Dans un système proportionnel, si le parti tiers obtient 20 % des voix il aura 20 % des sièges. Nous avons un système vraiment disproportionné qui fait pression en faveur de deux partis, l’opposition tend à s’unir au sein d’une seule formation. »

Un troisième parti peut-il émerger, par exemple les Libertariens ou les Verts ?

TRADUCTION

« Non, en tout cas pas aux Etats-Unis. Aucun de ces deux partis n’est assez grand, ni assez populaire. Supposons que vous êtes un Libertarien et que vous êtes frustré par le bipartisme. Vous pouvez effectivement avoir un candidat, mais il ne sera jamais élu. Sinon, vous pouvez vous dire, certes, nous sommes en désaccord avec les Républicains sur les questions sociales mais nous avons les mêmes positions économiques. Et l’économie est notre priorité. Donc nous allons influencer le parti Républicain pour qu’il se consacre à l’économie (et moins aux questions sociales). Pour un électeur vert, c’est encore plus facile car les différences politiques entre les Verts et les Démocrates sont moindres. Donc si vous aspirez à être un représentant du parti vert, vous devriez participer aux primaires démocrates, devenir un porte drapeau du parti Démocrate puis tenter de faire évoluer le parti dans la direction que vous souhaitez. Il y a plus de chance que les choses bougent au sein d’un des deux partis que de voir un parti réussir à émerger à partir de rien. »

Et si les partis tiers avaient davantage d’argent ?

TRADUCTION

« Ça peut pas faire de mal d’avoir un peu plus de ressources,mais les barrières institutionnelles sont énormes. Si effectivement vous avez un peu plus d’argent vous pouvez peut-être vous faire connaître un peu plus. Par exemple, je ne pense pas que les gens ignoraient qui était Ralph Nader*, le problème c’est que si vous obtenez 5 ou 10 % des votes, vous n’aurez aucun grand électeur. En 1992, tout le monde savait qui était Ross Perot**, les médias aimaient parler de lui. Ils l’ont d’ailleurs probablement trop couvert médiatiquement par rapport aux chances qu’il avait de gagner l’élection. Il a suscité de l’engouement parce qu’il était intéressant et que son histoire était singulière. Il a participé aux débats avec les Démocrates et les Républicains. il a obtenu 20% des voix et zéro grand électeur. Si ce résultat ne permet pas d’obtenir de grands électeurs, le fait d’avoir un peu plus de moyens pour des partis qui obtiennent entre 1 et 2 % des voix n’aura pas d’incidence. Mais si un parti veut vraiment émerger en tant que troisième voie et qu’il n’est pas disposé à travailler à l’intérieur d’un des deux partis existant (je ne comprends pas trop pourquoi ils adopteraient cette stratégie) alors dans ce cas, avoir davantage d’argent ne serait que la première étape d’un très très long chemin pour perturber le système politique actuel. »

  • Ce dossier fait également l’objet d’un travail de mise en ligne spécifique réalisé par les étudiants.