Français d’origine vietnamienne, Dung Vo-Trung mène sa carrière de journaliste entre la France et le Vietnam. Regard d’un professionnel sur un pays où la liberté de la presse est l’une des moins respectées au monde.
Plus de 7 millions de personnes auraient visité le Vietnam en 2013. Ce statut de destination touristique idyllique tend à faire oublier qu’il figure dans la liste des 10 pires pays au monde en matière de liberté de la presse. Journaliste indépendant français d’origine vietnamienne, Dung Vo-Trung a passé le plus clair de sa carrière entre la France et le Vietnam. Travaillant aussi bien pour les médias français que vietnamiens, Dung Vo-Trung donne également des formations à ses collègues sur place. Selon lui, si la censure n’est plus aussi radicale que durant les années 80, les journalistes doivent savoir faire preuve d’ingéniosité pour exercer leur métier
« Aujourd’hui, l’arbitraire est impossible », explique Dung Vo-Trung. Dans le Vietnam de 2014, les autorités ne peuvent plus faire taire les journalistes par l’usage de la force. En revanche, ces derniers s’exposent à des procès qui peuvent les mener en prison, en particulier s’ils se sont montrés imprudents.
Un métier à risque
Un certain nombre de journalistes vietnamiens écrivent dans des journaux officiels, reconnus par le pouvoir, mais utilisent leurs blogues personnels pour publier des articles plus subversifs. Cette pratique est durement réprimée par les autorités. L’association Reporter sans frontières dénombre à ce jour 26 journalistes-blogueurs emprisonnés au Vietnam. Pour Dung Vo-Trung, le plus célèbre de ces blogues reste celui d’Anh Ba Sam, de son vrai nom Nguyen Huu Vinh, arrêté le 5 mai 2014. Après son arrestation, de jeunes journalistes ont repris le flambeau en continuant d’alimenter la page Web. « Il y a parfois plus d’un million de connexions par jour », souligne le journaliste indépendant.
Diffuser des informations pouvant déplaire au pouvoir est un exercice délicat qui peut parfois ressembler à une performance d’équilibriste.
La censure ne se limite pas aux procès pour diffamation. Les autorités font également tout ce qui est en leur pouvoir pour empoisonner le quotidien des journalistes jugés trop aventureux, affirme le journaliste indépendant. Selon lui, l’autocensure est aussi omniprésente dans le milieu professionnel.
Quand la rigueur est garante de sécurité
Pratiquer le journalisme au Vietnam fait courir des risques qui vont de l’interdiction de pratiquer ce métier à l’exil ou même la prison. Mais pour Dung Vo-Trung, si l’on prend les bonnes précautions, on peut se prémunir des conséquences les plus graves. « Je suis très, très prudent. Je ne m’autocensure pas, mais je suis prudent dans le sens où j’attends d’avoir toutes les cartes en main pour me défendre [avant de publier]. »
Les formations que Dung Vo-Trung offre aux autres journalistes vietnamiens portent avant tout sur la pratique d’un journalisme irréprochable. Bien faire son métier est pour lui la première et la meilleure protection.



















