Tout droit sorti de l’Isle-Verte, l’artiste Patrick Lavallée présentait ses oeuvres d’art populaire à l’agora de l’Assemblée nationale les 9 et 10 novembre derniers. L’exposition a permis au public d’entrer dans son univers mythique et folklorique.

C’est avec grande fierté que Patrick Lavallée a exposé ses créations entre les murs de l’Assemblée nationale, puisqu’elles représentent toutes des parcelles du patrimoine québécois. « Il ne faut pas que ça s’oublie l’histoire. Moi je veux être un porteur de tradition. Pour que nos enfants connaissent les contes et la culture », dit celui qui se surnomme le « Gosseux de possible ».  

Dispersées sur une table, des dizaines d’œuvres colorées attendaient les visiteurs qui voulaient venir y jeter un coup d’œil. Celles-ci ont été confectionnées à partir de matériaux recyclés tels que le bois et le métal, dans l’atelier du Bas-Saint-Laurent de l’artiste. « Je retire encore plus de fierté quand j’ai été capable de bâtir une pièce sans aller à la quincaillerie », souligne M. Lavallée. 

De gauche à droite, on peut observer les premiers jets du travail de l’artiste jusqu’à son œuvre finale. « Du singe à l’homme »: c’est comme cela que le Gosseux décrit son processus de création. – Crédit: Félix Lajoie

Les curieux ont pu observer entre autres « Le Draveur », qui rappelle le travail risqué des ouvriers qui poussaient le bois au gré du courant lors du dégel. Toutes les pièces étaient en vente au moment de l’exposition.

Mais le thème préféré de M. Lavallée reste les contes et les légendes québécoises. Lorsqu’il en parle, ses yeux s’illuminent. « J’en ai fait quelques-unes des œuvres sur la chasse-galerie, moi elle me passionne celle-là. Le pacte avec le diable… d’après moi, si j’avais la chance de la faire la chasse-galerie j’embarquerais », dit-il en rigolant.

Les mythes et légendes se font plutôt rares de nos jours dans le domaine de l’art populaire, selon le spécialiste Adrien Levasseur. « Je ne peux pas dire qu’il n’y en a pas, mais ce n’est pas quelque chose qui est fréquent », affirme celui qui a écrit quatre ouvrages et créé un site internet sur le sujet.

Selon M. Levasseur, ce type d’œuvre était autrefois plus commun, il y a plusieurs années. « Si on parle des chasse-galeries, on peut penser à Léo Arbour qui en a fait, mais il y a quand même soixante ans passés. Alors ce n’est pas nouveau », se souvient le spécialiste.

 

« Patrick [Lavallée] a commencé à faire des contes et légendes et je pense qu’il s’est aperçu que c’est quelque chose qui le rapproche de ses valeurs. Il a aussi un petit côté patrimoine, et je pense que ça ressort dans toutes les valeurs qu’il véhicule au niveau du Québec », soutient M. Levasseur, qui a déjà rencontré l’artiste il y a quelques années.

Pleins feux sur les artistes à l’Assemblée nationale

Dans le cadre de sa réouverture au grand public post-pandémie, l’Assemblée nationale désire se rapprocher des citoyens au moyen d’activités diversifiées. Des activités d’Halloween pour toute la famille ont notamment été organisées à l’extérieur lors du mois d’octobre.

« On essaie de toucher à toutes sortes de sphères que ce soit les arts, la science, la santé, la famille aussi. […]. On veut que les gens nous voient comme une place à visiter quand on vient à Québec mais aussi vivre des expériences, des événements. », explique Rachel Plante, cheffe d’équipe de la Programmation citoyenne à l’Assemblée nationale.

Dans ce cadre, le Parlement souhaite mettre de l’avant le travail des artistes québécois. C’est pourquoi l’art s’invite progressivement dans l’établissement. « À l’Assemblée on a une politique sur les arts qui est en cours de développement […]. On veut mettre la lumière sur les artistes québécois pour les faire rayonner », souligne Mme Plante.

C’est un employé du service des archives qui est tombé « par hasard » sur Patrick Lavallée. Il a ensuite suggéré l’artiste à l’équipe de la Programmation citoyenne, qui est en charge des activités réservées au grand public. 

Les œuvres de M. Lavallée ne représentent pas seulement des mythes, mais aussi des parties bien réelles de notre histoire: coureur des bois, draveur et joueur des Nordiques font partie de ce lot. – Crédit: Félix Lajoie

L’événement a servi à présenter M. Lavallée aux citoyens, puisque l’artiste a un calendrier chargé dans les prochains mois. En février prochain, l’artiste participera au 100e anniversaire de la manifestation de 400 femmes à Québec pour réclamer le suffrage féminin, qui a eu lieu le 9 février 1922. Une œuvre du « Gosseux » sur le droit de vote des femmes sera alors dévoilée au grand public, puis y sera exposée de façon permanente..

Les concepts identitaires au Québec évoqués dans les œuvres de Patrick Lavallée cadrent tout à fait avec les valeurs du Parlement, estime Mme Plante. « C’est un bonus, parce qu’il a des thèmes qui sont chers à la société québécoise. On a vu entre autres dans ses œuvres la chasse-galerie. Nous on a aussi représenté la chasse-galerie à l’Assemblé sur nos murs […] comme repère identitaire si on veut », ajoute-t-elle.

M. Levasseur se dit très content de la présence d’art populaire entre les murs de l’Assemblée nationale, ce qui contribue à lui donner ses lettres de noblesse: si on recule de vingt ans, les gens décrivaient ce genre d’art comme des « bébelles », selon lui.

« Il y a quarante ans passés, j’allais voir les artistes et ils étaient dans leur sous-sol, et maintenant les voilà dans les musées en train d’exposer. Il y a certainement eu une évolution », conclut le spécialiste.