La 30édition de la semaine de prévention du suicide s’est ouverte le 2 février au Québec avec une forte mobilisation des agriculteurs. L’Association québécoise de prévention du suicide (AQPS) et l’Union des producteurs agricoles (UPA) travaillent régulièrement ensemble pour venir en aide à cette profession soumise à un stress permanent.

51% des producteurs agricoles du Québec sont en détresse psychologique élevée. S’il est difficile de connaître les chiffres exacts du suicide chez les agriculteurs (les professions ne sont pas toujours mentionnées dans les rapports des coroners), certaines données parlent d’elles-mêmes. Le niveau de suicide des agriculteurs, largement supérieur au taux de 20,4 suicides pour 100 000 habitants dans la population québécoise, représente bien la réalité d’une profession en grande difficulté. 

« Beaucoup de facteurs ne leur appartiennent pas, note Manon Vial, responsable de la santé psychologique à l’UPA. La météo, les acteurs économiques, les dettesTout cela fait des agriculteurs une population plus à risque que la moyenne. » L’AQPS partage ce constat et l’explique par une exposition trop longue au stress qui affecte durablement la santé mentale des producteurs. « Les agriculteurs sont beaucoup plus vulnérables, explique Jérôme Godreault, directeur général de l’AQPS. Ils doivent gérer un mode de vie stressant, loin de l’image idyllique qu’on peut avoir du métier. »

Pourtant, si le mal-être semble être connu et partagé par une majorité de producteurs, beaucoup n’osent pas en parler autour d’eux. « Les agriculteurs sont souvent fiers et ne vont pas chercher de l’aide, déplore Manon Vial. Ils veulent s’en sortir seuls. »

Plusieurs moyens de prévention

L’UPA, qui représente quelque 1 100 producteurs dans le secteur de la Capitale-Nationale-Côte-Nord, a mis en place plusieurs services pour renforcer la prévention auprès des producteurs à risque. L’organisation syndicale a établi une collaboration avec l’AQPS pour décliner le principe des sentinelles afin de l’adapter spécifiquement au secteur agricole. Avec une formation d’une journée, des personnes proches du secteur peuvent désormais aider à repérer les sources de stress et référer les agriculteurs concernés à des institutions qualifiées.

Au-delà de cette mission bénévole, l’UPA fait appel à des travailleurs de rang, des travailleurs sociaux spécialisés dans le domaine agricole et fermier qui vont à la rencontre des producteurs et de leur familles pour établir un dialogue. « S’ils n’ont pas la capacité de sortir, de faire la route pour parler, c’est à nous de nous déplacer vers eux », estime Jérôme Godreault.

Cette réflexion autour de la prévention du suicide a toujours été forte dans le milieu agricole. Elle l’est d’autant plus dans les secteurs de Portneuf et de l’île d’Orléans, où deux nouveaux suicides ont encore fortement marqué la population en 2019.

Pour donner un aperçu concret de la vie des agriculteurs de la région, l’UPA a participé à la création de « La voie agricole », une websérie qui parcourt différents territoires du Québec à la rencontre des producteurs locaux. À l’occasion de la semaine de prévention du suicide, un épisode spécial sera consacré à la détresse psychologique durant la première quinzaine de février. Une nouvelle façon de redonner une voix à une profession qui souffre souvent en silence.