QUÉBEC — L’industrialisation et la mondialisation conduisent les gens à banaliser le phénomène de la prostitution. C’est ce qu’a dénoncé la directrice de la Maison de Marthe, Madame Rose Dufour lors d’un diner-conférence à l’Université Laval organisé par l’organisme Centraide le mercredi 30 octobre 2013.
«Une arme à feu ne se vend qu’une seule fois, une femme peut se vendre des centaines de fois. Le sexe des femmes est devenu une marchandise », a dénoncé Mme Rose Dufour. Docteur en anthropologie, elle a fondé la Maison de Marthe au début des années 2000 et a accueilli une cinquantaine de femmes depuis le début de l’année. En entrevue, Madame Dufour a mentionné que son organisme était le seul au Québec à œuvrer auprès des prostituées et le premier qui a pour objectif d’apporter des outils dans l’accompagnement afin qu’elles puissent quitter le milieu de la prostitution.
La conférencière a abordé des concepts liés à l’industrialisation et la mondialisation, conduisant les gens à banaliser le phénomène. Quelques précisions : La prostitution est légale en Allemagne, aux Pays-Bas, en Grèce, en Suisse, en Hongrie, en Australie et en Nouvelle-Zélande. «Les bordels sont propriétés de l’État en Turquie et en Indonésie. L’industrie du sexe est considérée comme vitale à l’économie nationale en Thaïlande et aux Philippines.»
Selon Madame Dufour, ce n’est pas seulement l’industrialisation. Le problème provient des clients. Après avoir enquêté sur les hommes consommateurs de prostitution, elle a réalisé un ouvrage sur le sujet. Selon elle, «sans client, il n’y a pas prostitution». Elle a précisé que lorsqu’elle a décidé d’interroger des clients, on l’a mise en garde. «J’ai fini par rencontrer plusieurs clients en cinq mois. J’ai mis une annonce dans le Journal de Québec et j’ai demandé des hommes qui ont payé récemment pour du sexe. Pour une recherche sur la sexualité masculine. Anonymat garanti. 9h à 5h.»
Madame Dufour précise que ce ne sont pas tous les hommes qui consomment de la prostitution. Aux États-Unis, on estime que c’est environ 12% des hommes. En Grande-Bretagne ce serait 7%, en Suisse 19% et en Espagne 39%. Selon elle, ces chiffres sont liés à l’éducation et à la culture attachées au comportement sexuel et l’éducation reçue entre les hommes et les femmes.
Sujet tabou
Sujet relativement tabou, Madame Dufour lève le voile sur les statistiques. Elle stipule que sur les hommes consommateurs de prostitution, c’est 15% d’entre eux qui sont insatisfaits de leur relation amoureuse. Selon elle, les comportements masculins «ne sont pas innés, mais sont acquis».
La conférence On ne rêve pas de devenir prostituée est la première conférence d’une série de quatre, organisées dans le cadre de la treizième saison des diners-conférences de Centraide. La présente campagne «Donner éclaire des vies» tentera d’amasser 11,8 millions de dollars avant le 10 décembre 2013. Centraide région de Québec et Chaudières-Appalaches œuvre depuis 65 ans dans le milieu de la pauvreté et de l’exclusion sociale et vient en aide à 191 organismes et 19 initiatives communautaires.