Québec – Même s’ils sont particulièrement nombreux à Québec, les restaurants ont connu en 2014 une baisse de leur achalandage. Des restaurateurs de la région ont confié à L’Exemplaire que la concurrence accrue et la morosité économique rendent difficile l’exploitation d’un établissement.

Kathy Rioux est propriétaire du café Krieghoff sur l’avenue Cartier. Bien qu’elle ne craigne pas pour sa situation financière, elle voit sa clientèle diminuer légèrement à chaque année qui passe. Le froid de l’hiver, l’atmosphère économique actuelle et le vieillissement de la clientèle autrefois régulière sont à blâmer selon elle. Elle se réjouit cependant de ne pas avoir à entreprendre des mesures plus drastiques comme d’autres restaurants qui décident de fermer entre les services par exemple.

Mme Rioux affirme que son succès tenace provient d’une quête constante d’adaptation et de très hauts standards de qualité. Quant aux autres restaurants qui auraient plus de difficulté, elle trouve que des mesures drastiques telles que l’application de quotas empêchant les ouvertures trop nombreuses seraient inutilement coercitives. Elle croit par contre qu’ « il faut vraiment s’assurer au niveau de la ville de Québec que le produit est bon et que les gens vont perdurer parce que (…) ouvrir et fermer, ça ne donne rien. C’est une perte pour les restaurateurs, la ville et les commerces. »

Une offre trop abondante?

Avec un établissement pour 369 habitants, la région de la Capitale-Nationale affiche un ratio de restaurant par habitants plus élevé que des métropoles comme Montréal et New York.

Dans le quartier Saint-Roch, le propriétaire du Pub Edward et du MO Resto-Bar, Robert Brochu, ne cache pas que la concurrence ajoute une difficulté supplémentaire. « Chaque fois qu’un nouveau restaurant apparaît, on se sépare la tarte en pointes plus petites, et effectivement, c’est de plus en plus difficile de faire de la restauration », soutient l’entrepreneur qui baigne dans cette industrie depuis près de 30 ans.

« Il faut être compétitif, il faut être innovateur, il faut suivre les tendances, et ce sont des choses qui ne se font pas à moindre coût, souligne M. Brochu. Cela représente souvent des investissements majeurs ». Malgré tout, le restaurateur estime que la concurrence accrue n’est qu’un facteur parmi d’autres, et il n’hésite pas à pointer du doigt le ralentissement de l’économie.

La morosité économique au banc des accusés

Les difficultés observées sur le terrain par les restaurateurs se vérifient dans les statistiques. D’après les données de l’Association des restaurateurs du Québec (ARQ), l’industrie de la restauration pour la province de Québec a connu une décroissance nette de 3,5% en 2014 par rapport à 2013. Sur une période de 10 ans, la rentabilité d’un restaurant a chuté, passant de 4,8% à 2,6%.

Des chiffres inquiétants, mais qui ne s’expliquent pas par le nombre élevé de restaurateurs d’après François Meunier, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales de l’ARQ. « Il est clair que le Québec n’est pas dans une position avantageuse sur le plan économique et le secteur de la restauration est un des premiers à écoper », analyse-t-il. Le vice-président ajoute que la Colombie-Britannique affiche un ratio d’habitant par restaurant comparable à celui du Québec, et a néanmoins connu une croissance de ses ventes de 7% en 2014. Il met donc en garde contre l’utilisation du seul critère du nombre de restaurants:

C’est pourquoi, François Meunier ne cache pas son scepticisme lorsque certains acteurs de l’industrie proposent l’imposition de quotas sur les permis de restauration. « On ne peut pas empêcher la clientèle de se déplacer. Ce n’est pas parce que vous imposez un quota sur une rue que vous allez augmenter votre achalandage. C’est un peu utopique de penser cela », lance-t-il.

M. Meunier croit que la relance de l’industrie passe par le retour de la prospérité économique, et que le gouvernement dispose de « différentes options » pour ce faire. « C’est clair que si on donne un certain souffle aux consommateurs pour qu’ils puissent revenir dans un mode de consommation, on pourrait revoir de meilleurs jours dans l’industrie », soutient-il. La situation pourrait s’apaiser avec la baisse du prix de pétrole et la hausse du dollar américain, qui augmenteront le pouvoir d’achat des consommateurs et rendront plus attrayante la province pour ses voisins du sud.