La question de l’immigration n’a pas quitté les débats dans lesquels se sont affrontés les cinq chefs de parti politiques lors de cette campagne électorale. Andrea Bravo, étudiante en administration des affaires et immigrée au Canada depuis 17 ans, a suivi les promesses de chacun et elle juge important de « s’attarder davantage sur la façon d’accueillir les immigrants ». 

Ce mercredi, François Legault s’est rendu à la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain et a déclaré : « Tant qu’on n’aura pas stoppé le déclin du français, je pense que pour la nation québécoise qui veut protéger le français, ça serait un peu suicidaire d’aller augmenter les seuils d’immigration ». Certains de ses adversaires n’ont pas hésité à réprimander les termes que le chef de la CAQ a employés.

Depuis le début des élections provinciales 2022, des sujets qui reviennent souvent sur la table et qui divisent sont l’immigration et la francisation du Québec. Certains partis comme celui de Paul Saint-Pierre Plamondon, chef du Parti Québécois misent sur une diminution du seuil d’immigration en la réduisant à trente-cinq mille par an. D’autres partis, tels que le Parti Libéral Québécois ou Québec Solidaire, eux, cherchent à pousser le seuil d’immigration en proposant d’accueillir entre soixante et quatre-vingt mille étrangers par an. Les partis parlent de chiffres, débattent au sujet de la loi 96, entrée en vigueur le 1er juin 2022, mais ont-ils les moyens et la capacité de prendre en charge le bon accueil des immigrants ?

En 2005, Andrea Bravo a migré du Mexique, son pays d’origine, pour venir vivre au Canada. Elle découvre le côté anglophone du Canada en étant domiciliée à Toronto et en 2012, elle déménage à Gatineau, ville frontalière d’Ottawa. Lors de son apprentissage de la langue française à l’école secondaire, elle ne s’est pas toujours sentie soutenue par ses enseignants. « Lors de ma première année, j’ai travaillé dur pour apprendre la langue. Cependant, en fin d’année, deux professeurs m’ont pris de côté et m’ont suggéré qu’il serait mieux que, malgré mes efforts, je lâche tout et que je recommence mon année. J’avais trouvé ce commentaire très décourageant et décevant. » précise l’étudiante à l’Université Laval. L’apprentissage du français est une valeur plébiscitée au Québec. Hormis le Parti Conservateur d’Éric Duhaime et une position bancale de Dominique Anglade, cheffe de parti du PLQ, les partis souhaitent franciser les régions. C’est pourquoi, la loi 96, exigeant les entreprises à offrir des services en français, a vu le jour. Andrea juge que ce nouveau règlement isole le Québec du reste du monde non-francophone, alors que la province subit une pénurie de main d’œuvres monstre depuis plusieurs mois. « Ma mère a quitté Gatineau pour travailler dans l’Ontario, là où elle peut parler anglais, mais si elle était à la recherche d’un emploi présentement au Québec, sa compréhension du français ne lui suffirait pas. Avec la loi 96, si quelqu’un a les compétences pour exercer le métier, mais qu’il ne parle pas la langue, l’employeur ne pourra pas l’embaucher. » déplore la jeune Mexicaine.

Dans le contexte mondial des guerres civiles qui touchent une multitude de pays d’Asie, ou encore, la crise migratoire que connaissent les européens depuis le début de l’année 2022, l’immigration est devenue un enjeu mondial. Le territoire de Québec est vaste et présente, selon Statistique Canada, une densité de population d’environ 5 personnes par km2. Mais la langue peut être un frein au développement de ce large territoire. Lundi 3 octobre, la soirée électorale déterminera si plus ou moins de familles, comme celle d’Andrea Bravo, auront la possibilité de vivre, travailler et s’immerger dans la culture du Grand Nord.