QUÉBEC — «Avoir un rêve c’est important; l’entretenir l’est aussi. Le réaliser l’est encore plus.» La designer autochtone Kim Picard s’est ainsi adressée aux étudiants venus assister à sa conférence présentée le 12 novembre dans le cadre de la Semaine interculturelle Échange avec les Autochtones au Cégep Garneau.

Kim Picard, qui s’est installée à Québec il y a deux ans, a expliqué que les valeurs entrepreneuriales se développent à plusieurs endroits : en famille, à l’école, en entreprise et dans la communauté au sens large. Elle a raconté son parcours qui en témoigne.

Après avoir obtenu son diplôme en design de mode au Collège Lasalle, l’entrepreneure native de Pessamit, à l’ouest de Baie-Comeau, a travaillé pour diverses entreprises du milieu de la mode. Après quelques années, elle a senti le besoin de prendre une autre route et de s’impliquer dans la communauté autochtone. Kim Picard, dont le père est algonquin et mohawk et la mère, innue, a ainsi œuvré pendant cinq ans comme coordonnatrice jeunesse à l’Association des femmes autochtones. Cet emploi l’a amenée à venir en aide aux membres de sa communauté, mais aussi à mieux connaître sa culture. De l’impact de la mondialisation sur les cultures autochtones à l’expertise du peuple Maori sur la préservation de leur langue, en passant par l’estime de soi, la liste des sujets auxquels Kim Picard a raconté avoir touché au fil de colloques, conférences et autres événements est d’une richesse indéniable.

L’implication de la designer s’est aussi faite sous l’angle de la mode. Celle qui a remporté plusieurs prix pour ses créations a organisé des défilés où les mannequins sont des jeunes des communautés où se tiennent ces événements. Elle a relaté son expérience dans la réserve de Lac-Simon en Abitibi, alors qu’une vague de suicides venait de décimer la communauté. Leur participation à un défilé a changé l’attitude des jeunes, certains sont sortis de leur extrême timidité. «Leurs parents en pleuraient tellement ils étaient fiers», a-t-elle témoigné. Lorsque, deux ans plus tard, Kim Picard y est retournée pour organiser un autre défilé, des gens sont venus lui dire à quel point l’expérience avait été bénéfique pour certains jeunes.

Après avoir réalisé qu’il lui était possible de suivre sa voie tout en continuant de s’impliquer auprès des jeunes autochtones, Kim Picard a raconté en avoir eu assez de dire aux autres de réaliser leur rêve alors qu’elle-même ne réalisait pas le sien. La designer, qui a aussi complété un certificat en administration à l’Université McGill, a choisi de se lancer en affaires. «Comme on saute en bungee, en me disant que si ça ne marche pas, je n’aurai pas de regrets», a-t-elle imagé. Elle décrit ses collections comme à la fois classiques et modernes, dans lesquelles on retrouve beaucoup de symbolisme autochtone.

L’organisatrice de la conférence trouve important de présenter aux étudiants des profils d’entrepreneurs comme celui de Kim Picard. «De beaux exemples d’entrepreneuriat social, il y en a au Québec», a dit Josette Bourque, professeure en gestion et chargée de projet à la coopération internationale au cégep Garneau.