Que ce soit au civil ou au criminel, la police et la punition légale ne constituent pas toujours le meilleur moyen pour rendre justice. L’Autre Avenue, un organisme de « justice alternative » de Charlesbourg, utilise la médiation pour faire justice aux victimes des jeunes contrevenants et en même temps faciliter la réinsertion sociale.

Le processus est relativement simple. D’abord, les deux parties doivent être volontaires. Ensuite, des rencontres préparatoires ont lieu avec des travailleurs sociaux. Finalement, la victime s’assoit avec le contrevenant et la discussion s’engage. D’entrée de jeu, le contrevenant doit assumer son geste de telle sorte que la victime se sente considérée.

Sentiment de justice

On cherche à « donner de l’espace aux victimes » ,selon les mots de la directrice de l’Autre Avenue, Josée Dumont. La victime doit « reprendre du pouvoir sur la situation » pour qu’au final, il y ait « le sentiment de justice ». Le seul fait de rencontrer le criminel, d’apprendre à le connaître et de comprendre ses motifs désamorce souvent le traumatisme du crime chez les victimes.

« L’immense majorité des victimes qui passent à travers les institutions judiciaires nous reviennent en disant : pourquoi moi? Je ne sais toujours pas pourquoi il m’a fait ça? L’essentiel de l’intérêt de ce programme ce n’est pas de guérir, ce n’est pas d’éviter la récidive, c’est juste de permettre aux gens directement concernés par le crime d’avoir des réponses immédiates à leurs questions, de finir la conversation », précise Mme Catherine Roussi, Ph. D. en criminologie et spécialiste de la justice alternative.

Chicanes de voisin

Dans les chicanes de voisinages, la médiation peut aussi être utile. De toute façon la police est incapable de régler des conflits interpersonnels. Appelés pour des chicanes de voisins, les policiers donnent simplement les coordonnées du centre Autre Avenue.

Que ça soit entre voisins, au travail ou à l’école, les conflits mal gérés enflent dramatiquement. La médiation dégonfle ces procès d’intention. L’intervenante Lise-Marie Roy donne un exemple :

Un terrain neutre, comme l’organisme Autre Avenue est souvent bienvenu. « On n’est pas chacun sur notre territoire, en position de vouloir maintenir notre idée. Peut-être que ça va nous sortir de nos insultes habituelles. Mais ce n’est pas une garantie », juge Mme Roy.

« C’est les gens qui donnent le ton à l’échange. Avec tout le travail préparatoire, on part avec des conditions qu’on pense gagnantes pour que cette communication se fasse assez facilement. Plus souvent qu’autrement, chacun a son bout de responsabilité. Souvent ce qu’on va voir, c’est des ententes conjointes, dans le sens où chacun s’engage à faire quelque chose pour régler la situation », continue-t-elle.

Parfois, cela débouche sur une entente pour que le fautif pose des gestes de réparation. L’intervenante Anick Paquet donne des exemples :

Contourner une justice trop lourde

« On est dans un moment charnière. Dans les dernières années, on aurait tendance à penser que la justice est trop lourde. Elle coûte très cher. Elle ne fait pas nécessairement du bien aux victimes. Elle magane beaucoup les auteurs [de crimes]. Le but ultime de la justice, c’est de réinsérer et de permettre aux auteurs de crimes de se réinsérer dans la communauté. La prison, ce n’est pas la meilleure idée qu’on peut avoir à cet égard », explique Catherine Roussi, Ph. D. en criminologie et spécialiste de la justice alternative.

Ainsi, selon elle, « Les procès civils, notamment familiaux, en cas de divorce par exemple, sont de plus en plus remplacés par des processus de médiation. Et ce n’est pas seulement une économie financière, c’est aussi une économie humaine. C’est des coûts humains, c’est des coûts financiers, c’est des coûts moraux, c’est des coûts sociaux, c’est des coûts de santés, c’est des coûts en termes de psychologie de l’enfance qu’on réussit à économiser ».

Cette justice alternative ne s’applique toutefois pas aux adultes. Aucun organisme n’existe pour un tel processus. De plus, la loi n’est pas aussi claire que pour les mineurs. Toutefois, sur une base volontaire et a posteriori des tribunaux, la victime ou la famille de la victime peut demander à parler avec le criminel pour connaître les motifs du crime.

C’est l’article 3 du système pénal qui légitime la médiation comme procédure de justice. Il oblige en effet les adolescents (dix-huit ans moins un jour) à répondre de leurs actes au moyen de mesures proportionnées et favorisant la réadaptation et la réinsertion sociale. La justice alternative contourne la cour pénale et le dossier criminel pour trouver une solution qui répare les torts causés par le crime. C’est de la justice réparatrice.

Pour aller plus loin :

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L’autre avenue 

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