UNIVERSITÉ LAVAL — De passage à l’Université Laval ce mardi, le ministre Bernard Drainville s’est montré agacé de l’importance que prend actuellement la question de la constitutionnalité de sa Charte des valeurs québécoises. «J’en ai un peu marre de me faire dire : "les juges, les juges, les juges". Je respecte leur domaine de compétence, mais ils ne doivent pas remplacer le Parlement.»

«Avant les tribunaux, c’est au Parlement de parler, car en démocratie, ce sont les députés qui votent les lois, pas l’inverse.» À ses yeux, il est donc prématuré de présumer l’issue d’une éventuelle contestation de la Charte.

Bernard DrainvilleLe ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Participation citoyenne a tenu ces propos devant salle comble dans le cadre d’une conférence organisée par le Parti québécois de l’Université Laval. M. Drainville y a rappelé les grandes lignes de son projet, et a répondu aux questions des étudiants présents.

Alors que la majorité des échanges ont été cordiaux, un étudiant a tenu à exprimer bruyamment son désaccord envers le projet de Charte. Le jeune homme, qui a refusé de prendre le micro, s’est levé en fin de séance pour affirmer que le gouvernement ne pouvait pas sortir la foi des gens. Il a ajouté qu’il trouvait dommage que le gouvernement ait passé 20 ans à le former, puisqu’il allait quitter le Québec à cause de la Charte. «Il y en aura des milliers qui vont faire comme moi, sans compter ceux qui ne viendront pas», a-t-il lancé avant de quitter la salle.

Malgré cet épisode, le ton de la rencontre était, dans l’ensemble, posé, ce qui a permis aux étudiants d’en savoir plus long sur la pensée du ministre. Au sujet du droit de retrait par exemple, qui permettrait à certaines institutions comme les cégeps et les universités de se soustraire à la Charte pour une période renouvelable de cinq ans, le ministre a souligné qu’il ne s’agissait pas d’un sauf-conduit. «L’objectif est de leur donner du temps, on ne veut pas que la clause de retrait serve à se sortir de la charte», a-t-il précisé. Il a ajouté que les commentaires des citoyens inquiets de cette clause font toutefois réfléchir le gouvernement. «Ça fait partie des discussions que nous avons» a-t-il confié.

Par ailleurs, Bernard Drainville s’est montré prudent sur la question du déchirement auquel seront confrontées les personnes portant des signes religieux au sein de l’État. «Je suis très conscient que c’est difficile de leur demander une telle chose», a-t-il dit. En s’adressant à eux, le ministre a ajouté : «je veux que vous soyez conscients que ce n’est pas contre vous qu’on propose la neutralité. On la propose pour tout le Québec.»