La chanteuse brésilienne Bïa et le groupe Maracujá ont livré le 10 février un concert chaleureux au Palais Montcalm à Québec. La prestation fêtait le retour du public pour la première fois de l’année avec une jauge limitée à 50 % dans les salles de spectacle. Une joie pour les artistes brésiliens, partagée par Nicolas Houle, le directeur de programmation.
« Saudade ». Cette sorte de nostalgie heureuse, de bonheur et d’espoir envahit le public d’une lumière rouge dès la première note. La voix câline de Bïa, accompagnée par le groupe Maracujá, chante les désirs du cœur, les instants de bonheur et l’envie de vivre. « Au Brésil, on se serre, on danse, on s’embrasse sur la bouche », mime Bïa.
La chaleur qui émane de la scène infuse le parterre de spectateurs. « Ça fait tellement de bien de retrouver un vrai contact, de communier à nouveau avec le public », avoue la chanteuse brésilienne. Elie Haroun, le chanteur de Maracujá, renchérit : « J’aime faire de la musique pour les autres. Je ne trouve plus d’intérêt à jouer seul, sauf si c’est pour composer. »
Pour Nicolas Houle, directeur de la programmation du Palais Montcalm, c’est aussi un soulagement de voir du monde à nouveau affluer dans la salle Raoul-Jobin, d’une capacité de 750 personnes. Et ce, même si la jauge de 50 % n’est pas remplie pour le concert : « Les tickets ont été mis en vente il y a à peine trois semaines. Notre mission, c’est de redonner confiance à la clientèle, de renouer le lien. » Mais, il l’assure, « les spectateurs présents sont tellement contents qu’ils crient pour deux ».
Les salles de spectacle font face à un autre défi : le chamboulement de la programmation à cause de la Covid-19. Nicolas Houle a été contraint de programmer le moins de concerts internationaux possible et de favoriser la scène québécoise : « On essaie de toucher à tout. On fait venir des valeurs sûres, des découvertes, de la musique du monde, de la pop, du jazz, de la soul. Avec Bïa, on a cette dimension festive. Une chance que cela tombe en même temps que la réouverture des salles de concert. »
Sur la scène, les chansons d’amour sont contées avec le coração, le « cœur », en portugais. Bïa garde un lien puissant avec son pays natal, le Brésil : « Avec la pandémie, je ne suis pas retournée au Brésil pendant deux ans. L’idée de ne plus pouvoir m’y rendre m’a rendue folle. J’ai un besoin affectif d’y retourner, pour y puiser de l’énergie et de l’amour. »
Un modèle hybride
Cette énergie, elle la transmet depuis la scène tout le long du concert d’une heure et demie. « On ne sait plus si on est au carnaval de Rio sous +40° C ou au carnaval de Québec sous -40° C », lance Bïa avant d’entamer une nouvelle chanson au rythme dansant. De quoi faire bouger les têtes du public, resté assis dans la salle, ou celles des spectateurs restés chez eux. Le concert est également retransmis en direct pour les amateurs de musique brésilienne qui préfèrent y assister en ligne.
« Quand la pandémie a commencé, nous avons acheté de l’équipement pour faire des captations en direct de nos concerts et spectacles », explique Nicolas Houle. Le Palais Montcalm a ainsi pu continuer les représentations, non pas en présentiel mais en ligne, pour garder le lien avec le public. « À l’automne 2020, on a fait six concerts sans public, uniquement en ligne, puis à nouveau une demi-douzaine en 2021 », ajoute-t-il. Pour les artistes, jouer seul sur scène n’était pas toujours facile. « Ce qui était frappant, c’était le silence à la fin de la représentation », se souvient-il.
Pour la semaine de reprise des représentations, le Palais a choisi une formule hybride, avec des billets en salle et à distance. La pandémie les a poussés dans ce nouveau modèle, même si « c’est plus cher de diffuser en ligne que d’accueillir les artistes en salle », relève Nicolas Houle. Les concerts retransmis ont malgré tout su séduire le public, et ne posent pas de problème de jauge. « Nous avons eu un public nombreux au début de la pandémie, mais globalement nos audiences peuvent aller de 1 000 à 10 000 spectateurs en ligne », souligne-t-il.
Même dans l’euphorie de se retrouver face au public, ni Bïa ni Maracujá n’oublient ces spectateurs à distance dans leurs remerciements. Les musiciens et chanteurs annoncent déjà la dernière chanson. L’ultime note est à peine jouée que le public applaudit de toutes ses forces et acclame les artistes. Bïa et Maracujá reviennent vite sur scène, pour jouer un rappel. Mais dans le public, plus personne ne peut s’en empêcher, tout le monde se lève pour danser.
Une collaboration qui dure depuis 2015 L’une mélange la musique brésilienne avec la francophonie, l’autre avec le jazz. Bïa et Maracujá ont commencé à collaborer en 2015, mais « c’est en 2019 après un concert qu’on s’est rendu compte qu’on aimait vraiment jouer ensemble », raconte Bïa. Tous ont la même passion pour la musique et la culture brésilienne, même si rien ne les destinait à en faire leur vie. « Quand j’étais plus jeune, je chantais du gros rock », se rappelle Elie Haroun, chanteur de Maracujá. Bïa ne redécouvre le répertoire brésilien que « pendant un voyage en Europe, après mes études ». Et pourtant, les artistes croisent les doigts pour continuer à jouer ensemble. |

