Les tensions internes au sein de la Confédération des associations d’étudiants et étudiantes de l’Université Laval (CADEUL) font à nouveau surface alors qu’un membre met en ligne Bravo la CADEUL!. Ironiquement titré, le livre a pour objectif « d’offrir une base factuelle, exemples à l’appui, aux critiques que les gens ont envers la CADEUL », affirme André-Philippe Doré, principal auteur du texte.

La parution de Bravo la CADEUL! s’inscrit dans une saga entourant la production d’un livre sur les 35 ans de la CADEUL. En 2015, l’exécutif de la Confédération avait désigné Guy-Aume Descôteaux, ancien président de l’organisation, pour produire ce livre.

Le projet avait créé plusieurs malaises, à l’époque, notamment car M. Descôteaux avait été désigné directement par l’exécutif, sans processus d’appel d’offres. Le budget accordé à la production du livre s’était fait sous huis clos, ce qui avait valu à la CADEUL des accusations de manque de transparence de la part de membres de l’association. M. Descôteaux a par ailleurs déjà été payé. La publication de ce livre se faisant toujours attendre, l’organisation se fait périodiquement questionner et critiquer sur la gestion de l’avancement du projet.

Parallèlement, les positions « anti-CADEUL », tenues notamment par M. Doré et par d’autres membres de la communauté étudiante, se font aussi vivement critiquer. Dans une récente lettre ouverte, publiée dans Impact Campus, André-Philippe Doré se fait notamment accuser de mauvaise foi et de malhonnêteté intellectuelle par les 21 signataires de la lettre.

Dans ce contexte, la publication de Bravo la CADEUL! se veut un « pied de nez » à l’organisation, explique l’auteur. André-Philippe Doré espère que son livre servira d’appui à ceux et celles qui souhaitent mettre de l’avant un discours critique envers la Confédération : « quand les gens vont nous dire « non c’est pas vrai que l’exécutif contrôle la CADEUL », […] il va y avoir un livre maintenant qui va prouver le contraire », affirme-t-il.

Le livre numérique d’une quarantaine de pages de M. Doré discute de plusieurs enjeux entourant la structure et les pratiques de la CADEUL. (Crédit vidéo : Charles Ouellet)

La parution de Bravo la CADEUL! survient en plein milieu d’un important débat quant à l’affiliation de la CADEUL à l’Union étudiante du Québec (UÉQ). Le deuxième référendum sur la question se tiendra du 20 au 27 novembre prochain. Lors du premier référendum en 2015, les résultats n’avaient pas été entérinés en raison d’irrégularités.

L’étudiant en études anciennes déplore, entre autres choses, une perversion de la structure démocratique de la CADEUL. À titre d’exemple, M. Doré affirme la présence d’un fort parti pris en faveur du Oui lors de la tentative d’affiliation de la CADEUL à l’UÉQ en 2015 : « Par un « étrange hasard », Thierry Bouchard-Vincent, président de la CADEUL, accompagnait ces partisans du Oui partout où ils et elles allaient », écrit-il. Ouvertement critique, l’ouvrage rassemble une série d’objections ayant été adressées à la CADEUL dans le passé.

Le livre contient de nombreux titres ironiques et cinglants tels que « Servir le pouvoir », « Étouffer la dissidence », « Comment se trouver une job » et « Comment créer une association nationale sans l’accord des membres ». (Crédit vidéo : Charles Ouellet)

Des critiques qui ont une histoire

Certains enjeux soulevés dans le livre d’André-Philippe Doré font explicitement référence à un mémoire d’Érik Breton publié en 1994. Ancien étudiant de l’Université Laval, Érik Breton a aussi été président de l’Association des étudiants et étudiantes en anthropologie. Dans un article de 1997 sur le même sujet, il déclarait déjà que la CADEUL était « aux prises avec plusieurs ambiguïtés ». Érik Breton identifiait trois constantes dans le développement de la vie associative étudiante et de ses instances : un penchant carriériste, une tendance à l’institutionnalisation et un repli identitaire. De ces trois observations, il faisait le constat suivant :

« Il se dégage de la trajectoire des associations une ambiguïté quant à leur mission actuelle. S’inscrivant moins à l’intérieur d’un mouvement social qui reste à réinventer, elles veulent davantage s’aménager un espace reconnu par l’ordre dominant, d’où la pertinence de recourir à l’idée d’institutionnalisation de la vie associative. Pour Meister et Fortin, au fur et à mesure que l’association se développe et s’institutionnalise, elle perd de sa force critique, centralise le pouvoir aux mains des administrateurs et pervertit la démocratie dans sa vision collective ».

Érik Breton

Créée en 1980, la CADEUL est une confédération de 88 associations comportant près de 33 000 membres au sein du campus de l’Université Laval. Sa mission est de « représenter ses membres auprès des commissions et des groupes universitaires et gouvernementaux » en plus d’assurer « la défense des droits et des intérêts des étudiants et des étudiantes en matière pédagogique, politique, économique, sociale et culturelle tant au sein de l’Université Laval que sur la scène régionale et nationale ». Depuis 2014, elle offre un service d’adhésion à un régime d’assurance collective.

Joé Habel, ancien membre du Conseil d’Administration, décrit brièvement la structure de la CADEUL :

(Crédit Vidéo : Charles Ouellet)

Depuis la dissolution de la Table de concertation étudiante du Québec (TaCEQ) en mars 2014, la CADEUL n’est affiliée à aucune association étudiante nationale. La dissolution s’était produite suite aux départs de plusieurs de ses associations membres.

(Crédit graphique : Valérie Marcoux)