Le décès de Joyce Echaquan, le 28 septembre dernier, dans un hôpital de Joliette a semé l’indignation au Québec et a relancé la conversation sur le racisme systémique ravivée par le mouvement Black Lives Matter, l’été dernier. Pour Ruba Ghazal, députée de Mercier, le premier pas pour contrer ce problème, « c’est de le reconnaître et de le nommer », avant de pouvoir réformer les institutions Québécoises et de changer la culture de discrimination en s’inspirant de ce qui se fait déjà dans certains endroits.

Ruba Ghazal, députée de Mercier pour Québec solidaire, affirme que le racisme systémique repose sur l’existence d’un biais dans nos institutions qui favorise la discrimination. Lorsque celles-ci ne condamnent pas explicitement le racisme, les traitements discriminatoires sont perçus comme admissibles, déclare-t-elle. La députée estime alors que le premier pas pour contrer le problème est de reconnaître son existence et de le nommer pour ne pas le laisser survivre dans nos angles morts.

« Ce n’est pas juste un débat de sémantique. Ce qui est le plus important c’est de respecter les minorités qui demandent à ce que le problème soit reconnu. » – Ruba Ghazal

Catherine Potvin, professeure à l’Université McGill, explique qu’il faut avant tout que le Premier Ministre du Québec accepte « que le racisme est ancré dans l’ensemble des systèmes du Québec [pour] mettre sur pied des solutions qui seront également systémiques. » Co-instigatrice de la lettre ouverte adressée au Premier Ministre le 9 octobre dernier, elle souligne l’urgence de reconnaitre la nature systémique du racisme envers les populations autochtones spécifiquement. Cette lettre a été appuyée par 473 professeur.e.s d’université du Québec et de l’Ontario.

Plusieurs solutions pour plusieurs problèmes

Autant la députée que les signataires de la lettre ouverte rejoignent les conclusions du Rapport Viens, déposé en 2019. Tous insistent sur le fait que les solutions à trouver sont nombreuses puisque les problèmes sont divers. Mme Ghazal milite pour une approche préventive et suggère d’investir davantage dans l’intégration des nouveaux arrivants afin de favoriser leur inclusion et leur bonne compréhension de la culture québécoise.

La Députée donne pour exemple les Centres d’orientation et de formation des immigrants (COFI). Ces centres offraient aux nouveaux arrivants des services de francisation et d’accompagnement dans le processus d’établissement. Mme Ghazal suggère que des établissements comme les COFI soient réinstaurés et qu’ils soient implantés dans les régions, pas uniquement dans les grandes villes.

Elle explique également qu’une des solutions principales pour contrer le racisme au Québec serait de favoriser l’embauche des minorités dans la fonction publique. Ruba Ghazal indique que le premier ministre a mis sur pied une commission qui se penche sur la question du racisme depuis le mouvement Black Lives Matter. Toutefois, la députée témoigne qu’il n’y a pas de personnes racisées qui vivent de la discrimination autour de la table.

Mme Ghazal questionne les souches du problème de racisme au Québec. « Est-ce que la discrimination au Québec relève de la discrimination déjà vécue dans le passé ou d’un besoin de se sentir supérieur ?  Est-ce que c’est par peur de perdre son identité dans une mer anglophone ? » Chose certaine, elle estime qu’il y a une culture de discrimination à changer et que c’est quelque chose qui « prend du temps et de la volonté politique ».

« M. Legault ne peut pas rester dans sa tour d’ivoire. Les organismes et les personnes qui sont en plein cœur du problème, il ne faut pas qu’ils soient juste consultés, il faut qu’ils fassent partie de la solution. » – Ruba Ghazal

La police de concertation

Pour ce qui en est de la question du profilage racial, des réformes dans les systèmes de police sont nécessaires estime la députée solidaire, qui prend en exemple le cas de la Ville de Longueuil. Le programme de police de concertation du Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL) suit l’approche d’investir son corps policier principalement dans la prévention et dans le dialogue avec les citoyens. C’est une philosophie qui privilégie « l’intelligence émotionnelle » – la compassion et la compréhension – des agents, explique l’agent Ghyslain Vallières, policier et relationniste au sein du SPAL. Il déclare que chaque agent doit agir comme un chérif de réseaux, soit un officier accessible et en contact avec tous les citoyens de son territoire, un mandat qui dépasse le mandat de police criminelle et pénale traditionnel.

L’agent Vallières met l’accent sur l’importance de développer des liens de confiance avec la population : les agents travaillent désormais étroitement avec les organismes communautaires de leur milieu afin d’amorcer des initiatives de prévention plutôt que de ne chercher qu’à désamorcer des situations. Selon lui, il est important de développer des relations saines avec les citoyens et de bien connaître son milieu pour bien pouvoir aider les gens.

« Je dis [aux citoyens de mon comté] : considérez-moi comme votre beau-frère dans la police et appelez-moi si vous avez des inquiétudes. » Ghyslain Vallières