Il existe des organismes communautaires à Québec qui mettent en avant de nouvelles perspectives d’intervention sociale. C’est le cas de l’association Le Sextant, qui propose d’utiliser la voile en tant qu’outil d’intervention. La fondatrice de l’organisme Catherine Bergeron concrétise son projet de traverser de l’océan Atlantique avec un équipage de six jeunes aux prises avec des difficultés socioprofessionnelles.
C’est en faisant son baccalauréat en service social que madame Bergeron a commencé à songer à son projet de traversée en mer. Suite à une rencontre avec Catherine Ferland-Blanchet, maintenant présidente et chargée de projet, l’organisme s’est vite concrétisé. Le Sextant a été fondé en 2016, ce qui a permis aux deux intervenantes de combiner leurs deux aspirations: voile et intervention.
Le Sextant ? Un nom qui sème la curiosité, mais qui fait référence à l’outil d’orientation utilisé lors de la navigation. Comme l’initiatrice du projet le souligne, « c’est un organisme qui utilise la mer comme outil de développement personnel et social ».
Le projet de la traversée vient en aide à des jeunes adultes qui se retrouvent livrés à eux-mêmes, souvent parce qu’ils ont décroché du système scolaire traditionnel ou car ils ont plusieurs difficultés d’ordres personnel ou social.
Le voilier Rara Avis, qui appartient à l’association française Amis de Jeudi-Dimanche (AJD) et qui sera prêté à l’organisme, partira de la Guadeloupe le 9 mai prochain pour une traversée transatlantique d’une durée de 44 jours, comme il est illustré dans ce court extrait.
De plus, madame Bergeron remarque qu’il y a un manque de service pour cette clientèle particulièrement l’été. En effet, à l’exception de Graffcité, il existe peu de projets en cette saison qui permettent à ces jeunes de maintenir des activités qui sollicitent leur participation ou qui développent les compétences socioprofessionnelles. Pour l’intervenante, le bateau est donc un médium d’intervention qui est unique pour faire de l’intervention de groupe.
La concrétisation d’un projet
Le recrutement des participants est fait en collaboration avec le Centre Jeunesse Emploi et commencera début mars, où chacun d’entre eux sera invité à envoyer une lettre de candidature pour partager sa motivation face au projet.
Le projet permettra aux six jeunes adultes qui auront été sélectionnés de pouvoir s’immiscer dans un environnement atypique. Ils seront amenés à développer rapidement des compétences autant personnelles que dans l’univers de la navigation.
Des activités de préparation sont prévues avant le départ afin qu’ils assimilent quelques connaissances de base en navigation. Comme le soulève Catherine Bergeron, ces ateliers serviront également à préparer les jeunes à vivre cette aventure par rapport au mélange interculturel, mais aussi à la relation entre les Antilles, la France puis le Québec.
D’après l’intervenante sociale, le défi sera de « bâtir un groupe qui va être à la fois complémentaire, mais aussi assez uniforme », tout en sélectionnant des jeunes adultes majeurs et des deux sexes. Catherine Bergeron ajoute qu’il existe une certaine difficulté au niveau de la sélection des six personnes choisies, considérant qu’elles devront prendre l’avion et traverser des frontières, ce qui explique qu’ils ne pourront pas accepter les candidats qui ont un casier judiciaire.
Des données qui parlent
Pour Camille Audet, intervenante psychosociale et étudiante en psychoéducation, un projet comme Le Sextant apparaît pertinent puisque certains de ces jeunes adultes « n’ont pas beaucoup d’accompagnement, surtout quand ils sortent du Centre Jeunesse».
Selon une étude menée en 2011 et portant sur Les jeunes adultes dans les arrondissements La Cité Limoilou et les Rivières de la Ville de Québec, « le recours aux organismes» pourrait aider des jeunes en difficultés ayant un cumul d’« échecs scolaires, un diagnostic de maladie mentale (…) un manque d’expérience du marché du travail» à sociabiliser davantage.
Pour certains, l’expérience peut permettre d’être outillés pour la première fois par des intervenants qui sont à même d’identifier « des lacunes à ces cas particuliers dont les besoins dépassent le conseil en orientation, la remise en état psychologique ou la recherche d’un emploi ».
Le financement et ses revers
Catherine Bergeron souhaite réaliser ce projet depuis 2016. C’est aujourd’hui, aux deux tiers des fonds amassés, que le projet se concrétise pas à pas.
Bien qu’elle ajoute que « la ville de Québec a une belle écoute », il reste que les fonds alloués à un organisme communautaire pour ce type d’initiative ne constituent qu’une petite partie et que les activités de financement sont de mises pour pouvoir réaliser le projet. Madame Bergeron indique que les futurs participants seront amenés à participer au financement en ayant recours à diverses méthodes comme « l’emballage en épicerie ».
Parmi les partenaires, l’organisme compte notamment la Ville de Québec, l’AJD et les carrefours jeunesse-emploi (CJE). Cela dit, certains partenariats financiers ne peuvent s’effectuer, car les critères d’admissibilité se heurtent entre eux lorsqu’il s’agit d’un projet québécois qui se déroule à l’extérieur. De plus, Le Sextant n’est pas reconnu comme étant un Organisme de Bienfaisance Enregistré (OBE), ce qui les empêche d’émettre des reçus d’impôts.