Depuis 2010 déjà que plane le projet d’installer un site d’injection supervisée (SIS) dans la ville de Québec. Aujourd’hui, six ans plus tard, le projet en est toujours à l’étape des pourparlers administratifs. Et, la réforme de la santé n’a en rien contribué à l’avancement du projet.

Nathanaëlle Thériault est docteure spécialiste en santé publique et en médecines préventives au Centre intégré universitaire de la santé et des services sociaux de la Capital-Nationale (CIUSSS). Elle est bien au courant du dossier.

Elle a collaboré à l’enquête de 2014 sur problématique de la consommation de drogues injectables du Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale (CSSS). Elle indique que la restructuration du système de santé d’avril 2015 a engendré certains délais supplémentaires en ce qui concerne le développement du projet.

« Il y a eu énormément de mouvements dans le réseau de la santé. Il fallait interpeler les bonnes personnes et elles n’étaient pas encore nommées dans leurs fonctions. Il a fallu attendre que cette restructuration soit terminée », explique docteure Thériault.

Toutefois, « un plan de travail a été élaboré afin de proposer un échéancier de travail à partir du moment où les travaux se remettront en branle. Le plan a été présenté au comité de direction du CIUSSS de la Capitale-Nationale. Et, on pense que les travaux pour la phase deux vont pouvoir reprendre », précise Mme Thériault.

Les travaux de la phase deux permettront de déterminer quelle sera la proposition en termes d’offres et de services et, aussi, d’assurer que le projet obtienne un degré d’acceptabilité sociale satisfaisant au sein de la population. La première phase consistait en la production de l’enquête de 2014 du CSSS.

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Sources : le Conseil de quartier de Saint-Roch et le Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale.
Une problématique présente dans les lieux publics

Les gens y marchent, y font de la course à pied, y font du vélo ou, simplement, s’y assoient pour profiter du paysage. Les abords de la rivière Saint-Charles sont un lieu propice pour ce genre d’activités. Toutefois, il s’agit aussi d’un endroit où certains s’y injectent des drogues.

Difficile de tracer un portrait de la consommation de drogues injectables aux abords de la rivière Saint-Charles. Difficile tout simplement de tracer un portrait de ce type de consommation dans la ville de Québec.

Dans son enquête de 2014, le Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale (CSSS) explique qu’en raison du caractère illicite de la consommation de drogues, « les données sur le nombre de personnes de la ville de Québec touchées par cette problématique ne peuvent qu’être approximatives ».

Bien qu’il n’existe aucune donnée précise sur la consommation de drogues injectables, cela ne signifie pas que cette problématique soit minime dans la ville de Québec. Point de Repères, un organisme dont le but est de distribuer du matériel d’injection stérile afin de diminuer la transmission de maladies, compile des données qui témoignent de l’ampleur de la problématique.

Sources : rapports annuels de l'organisme communautaire Point de Repères.
Sources : rapports annuels de l’organisme communautaire Point de Repères.
Une solution à la consommation dans les lieux publics ?

Selon l’enquête du CSSS de 2014, les personnes qui consomment dans les lieux publics le font principalement « parce qu’elles sont sans domicile fixe, qu’elles ne veulent pas fréquenter de piqueries ou pour éviter de consommer à domicile (présence des enfants ou de conjoint) ».

Dans ces circonstances, l’établissement d’un site d’injection supervisée (SIS) pourrait bien représenter une solution à la consommation de drogues injectables dans les lieux publics, puisqu’un site de ce genre leur offrirait un environnement consacré à cette pratique.

Mme Thériault explique que l’établissement d’un SIS doit tenir compte des services déjà existants en ce qui concerne le choix de son emplacement.

 

Source : Liste officielle des centres d'accès au matériel d'injection au Québec.
Source : Liste officielle des centres d’accès au matériel d’injection au Québec.

Mme Thériault rappelle que le projet de SIS repose sur une approche de réduction des méfaits. Selon l’enquête de 2014, cette approche se fonde « sur le constat que l’absence de consommation de drogues dans la société est illusoire, et que les approches traditionnelles […] ont leurs limites ».

Elle précise qu’en accueillant ces personnes qui sont souvent vulnérables et désaffiliées, un SIS permettrait « de mettre ces personnes en lien avec des services de santé et des services communautaires. Certaines personnes vont même décider d’entreprendre des démarches afin de vaincre leur dépendance. Cela fait partie des choses que l’on observe avec les services d’injection supervisée ».

Le projet doit également tenir compte de la problématique spécifique de Québec afin d’adapter son offre de services et, à la fois, de « l’acceptabilité sociale auprès de la population de quartier », résume docteure Thériault.