L’argent est la monnaie d’échange par excellence dans l’économie mondiale. Pourtant, le troc plus traditionnel n’est pas jeté aux oubliettes. À Québec, les derniers mois ont apporté un regain d’intérêt pour les coopératives qui favorisent les échanges et la solidarité. Dans l’économie dite de partage ou collaborative, le don de soi et la lutte contre la pauvreté est au cœur de l’action.

Dans la Capitale nationale, des organismes se démarquent par leur façon d’être puisqu’ils suscitent l’échange entre individus. Le contact entre êtres humains est toujours l’un des moyens pour atteindre leurs objectifs : lutte contre la pauvreté ou encore partage des connaissances, par exemple. Dans le quartier Saint-Roch, sur la rue Saint-Joseph, l’Accorderie de Québec est l’un des organismes qui participe à ce genre de mouvement social.

À l’Accorderie, les membres qui s’inscrivent ont l’opportunité de proposer différents services ou d’aller chercher ceux offerts par les autres membres. Chaque nouveau membre, appelé aussi « accordeur », reçoit quinze heures dans sa banque d’heures. Lorsque le membre reçoit un service, il paye toujours  sa contrepartie en heures équivalentes de service. C’est le même principe pour la personne qui produit le service. Par exemple, un membre qui enseignera l’anglais pendant une heure à un autre membre qui le désire recevra une heure dans sa banque, qu’il pourra utiliser plus tard, par exemple, pour faire tondre son gazon. Rien n’est payé en dollar, il s’agit d’un principe d’échange de service à l’échelle de l’association.

Bettina Cerisier, la coordinatrice de l’Accorderie de Québec, explique que le partage est un outil pour lutter contre la pauvreté et qu’en étant accordeur, il est possible de « sauver de l’argent. »

[soundcloud url= »https://api.soundcloud.com/tracks/260733433?secret_token=s-qAWvf » params= »color=ff5500&inverse=false&auto_play=false&show_user=true » width= »100% » height= »20″ iframe= »true » /]

Connaissances partagées

C’est dans le quartier Limoilou qu’est installée la coopérative de solidarité La Patente. Cette bâtisse bleue ne passe pas inaperçue. Des bruits de scies et de marteaux peuvent se faire entendre de l’extérieur. Les visiteurs pourraient être étonnés en entrant. Plusieurs grandes salles abritent des outils de toutes sortes reliés au monde de la menuiserie, de la métallurgie et du textile, entre autres. En effet, La Patente est un atelier de fabrication collectif et partagé. Là aussi, le partage est à l’honneur dans les actions.

L’une des différences avec l’Accorderie consiste au mode de paiement. L’abonnement se paie avec de l’argent, et ce, pour la journée, le mois ou l’année, afin d’être en mesure d’utiliser les outils et l’accès aux formations. Les matériaux ne sont pas inclus. Dans ce lieu, il s’agit de se réapproprier les connaissances manuelles, et ce, en favorisant les échanges humains. La Patente définit ses valeurs et son implication dans la communauté en les plaçant sous la catégorie de l’économie de partage, explique Pénélope Roberge, coordinatrice à La Patente.

[soundcloud url= »https://api.soundcloud.com/tracks/260732835?secret_token=s-KWI3u » params= »color=ff5500&inverse=false&auto_play=false&show_user=true » width= »100% » height= »20″ iframe= »true » /]

Engouement croissant

L’économie de partage est un phénomène croissant qui se remarque par l’intérêt suscité envers plusieurs coopératives de solidarité.  L’Accorderie de Québec est l’une de celles qui a connu une popularité grandissante ces derniers mois. Ce sont environ vingt-deux nouveaux membres par mois qui s’y inscrivent.  

La Patente ne fait pas exception, où un intérêt grandissant de la part des citoyens de la ville de Québec a été remarqué. La transmission du savoir manuel intrigue. C’est 35 membres par mois qui s’inscrivent et les formations sont souvent complètes, raconte Madame Roberge.

Plusieurs corporations ou associations se réclament de l’économie de partage, telles qu’Airbnb ou UberX. Pourtant, ces compagnies ne présentent pas réellement les particularités de ce type d’économie, explique Monsieur Luc Audeband, professeur agrégé au département de management de l’Université Laval. Selon lui, la structure de ces compagnies ne reflète pas le partage, contrairement à des lieux comme l’Accorderie ou La Patente.

[soundcloud url= »https://api.soundcloud.com/tracks/260733872?secret_token=s-8mATM » params= »color=ff5500&inverse=false&auto_play=false&show_user=true » width= »100% » height= »20″ iframe= »true » /]

Prioriser le social

Ce que viennent chercher les gens auprès de ces organismes est différent d’une personne à l’autre. L’un des éléments qui revient le plus souvent chez les participants de l’économie du partage est la création de liens sociaux. Par exemple, le jeudi matin à la Patente, un groupe de personnes à la retraite viennent chercher le contact social. D’autres viennent chercher des connaissances ou en profitent pour utiliser les outils mis à disposition par d’autres membres.

Pour Bettina Cerisier, être membre d’un organisme comme l’Accorderie ne peut que être bénéfique. La création de lien social est l’un des enjeux fondamentaux de leur organisme. « Je ne peux pas croire qu’il y est des méfaits à remettre l’humain au cœur des échanges », a-t-elle déclaré.

[soundcloud url= »https://api.soundcloud.com/tracks/260733609?secret_token=s-NUqnN » params= »color=ff5500&inverse=false&auto_play=false&show_user=true » width= »100% » height= »20″ iframe= »true » /]

Difficultés du futur

Madame Cerisier explique que la popularité de ce type de lieu de rencontre risque de continuer à monter en flèche. « Les politiques d’austérités des deux dernières années marquent un appauvrissement de la population et un manque de confiance au dollar. » Les gens vont voir ailleurs. « Je crois que plus une population est appauvrie, plus les gens vont avoir besoin de ces économies. » Puisque le but de la coopérative est de contrer la pauvreté, elle aimerait offrir moins de soutien, dans le sens où cela signifierait qu’il y a moins de gens dans le besoin. 60 % des accordeurs gagnent moins de 30 000 $ par année contre 40 % qui gagnent plus. Ce mélange offre une diversité des services.