L’administration Labeaume a pris la décision, le 18 janvier dernier, de retirer les éclairages DEL à lumière blanche des quartiers résidentiels et de les confiner aux parcs industriels et aux autoroutes. Patrick Rochette, directeur adjoint à la recherche du Département d’ophtalmologie de l’Université Laval salue cette décision. Les études le prouvent; la lumière émise par les DEL a un effet nuisible sur le sommeil et l’éclairage de rue n’est qu’une partie de l’enjeu.


Deux types d’éclairages: à gauche un éclairage incandescent traditionnel, à droite un éclairage au DEL blanc.

Crédit photo: Érik Chouinard

Le bleu énergétique et énergisant

Selon M. Rochette, la clé des effet de la lumière émise par les DEL sur le sommeil se cache dans les longueurs d’onde de la lumière qui atteignent l’oeil. Sur la base de 24 heures, le cycle du sommeil et de l’éveil est régulé par la sécrétion de différentes hormones, entre autres lié à l’exposition lumineuse. C’est ce cycle qui porte le nom de rythme circadien.

Les ampoules DEL émettent à plus forte intensité entre les longueurs d’onde de 400 à 500 nanomètres (nm). Cette étendue correspond au bleu sur le spectre de la lumière visible. Certaines cellules de la rétine réagissent à la lumière de ces longueurs d’onde. «Cette lumière va stimuler la rétine qui va ensuite provoquer la sécrétion de cortisol, une hormone de stress, cette hormone, qui est normalement sécrétée le matin pour réveiller le corps, dérègle le rythme circadien », explique M. Rochette.

Crédit vidéo: Érik Chouinard

Avec le remplacement des ampoules DEL blanche de 4000 K par des celles de 3000 K à diodes ambrées, les effets sur le sommeil peuvent être endigués selon le chercheur. « On a des moyens simples de filtrer cette lumière très bleue là, si on réussit à le faire, c’est certain qu’on va obtenir des résultats qui vont faire en sorte que les éclairages ne viendront pas perturber le rythme circadien », affirme-t-il.

Cette lumière bleue nuisible ne provient pas seulement des éclairages de rue. Les ampoules DEL sont aussi bien présentes à l’intérieur même des ménages. Il y a même fort à parier qu’elles permettent la lecture de ce texte. Les rétroéclairages des écrans des ordinateurs, des télévision et des cellulaires sont justement faits de ce type d’ampoules. Ainsi selon M. Rochette, ce sont ces sources lumineuses qui sont les plus susceptibles de dérégler le rythme circadien et tel que démontré, il y en a partout.

L’intensité énergétique des DEL rivalise avec celle du soleil, contrairement aux éclairages incandescents.

Peu d’effets sur la santé des yeux

La lumière bleue émise par les DEL blanches pourrait aussi  avoir un effet sur la dégénérescence maculaire liée à l’âge, qui comme son nom l’indique, est une maladie dégénérative des yeux. « C’est la première cause de cécité chez les personnes âgées, précise M. Rochette dont l’expertise scientifique porte entre autres sur le sujet. On essaie de comprendre comment la lumière bleue peut causer des problèmes pour les cellules de la rétine. »

Cependant, il explique que ce ne sont probablement pas les éclairages de rue qui pourraient être considérés comme étant des facteurs aggravants de cette maladie. « Puisque l’intensité de la lumière décroit exponentiellement avec la distance parcourue, il est très peu probable que les lampadaires DEL aient un effet toxique sur la santé oculaire », allègue-t-il.

M. Rochette jette surtout le blâme sur les autres sources de lumière bleue, comme les écrans d’ordinateur et de téléphones portables.  Ces appareils sont justement rétro éclairés par des DEL blanches. « On peut penser qu’il y aurait plus probablement des problèmes à long terme dû à l’exposition aux écrans dans lesquelles on a le nez collé », déclare le chercheur.

Une bonne nouvelle pour les astronomes

Philippe Moussette, président du club d’astronomie Vega de Cap-Rouge, est plutôt soulagé quant à la décision de la ville de ne pas poursuivre l’implantation systématique d’ampoules DEL dans les éclairages de rue. Après avoir lui aussi exprimé ses préoccupations à la ville concernant les impacts négatifs de la lumière bleue, il dit avoir reçu une écoute attentive de la ville qui « attendait de recevoir d’autres résultats d’étude pour prendre une décision ».

Crédit son: Francis Beaudry

Même s’il brosse un portrait nuancé de ce type d’éclairage, l’auteur et astronome croit que la petite quantité de lampes au DEL de 4000 K qui seront installées dans la ville de Québec ne fera pas une si grande différence sur l’observation des astres célestes, surtout si elles sont remplacées par des lampes à diodes ambrées.

Crédit son: Francis Beaudry